La tribu arrive à la Pointe du Chevet…
Léo : « Zutalor ! C’est marée haute ! »
Samuel : « Il va falloir attendre que la mer descende… »
Max : « Mon bonomou, où tu cavales comme ça ? C’est marée haute. Tu veux te ploufer ? »
Le chevalier : « Je vais au bord de l’eau, attendre que la mer descende… »
Max : « Tu vas manger ton sandouich ? »
Le chevalier : « Oui 🙂 »
Max : « Tu as du chocolat pour nous ? »
Le chevalier : « Oui, j’en ai toujours de crainte de me faire dévorer par un petitours chocolatophage frustré. »
Max : « C’est sage 🙂 Un petitours privé de chocolat peut devenir imprévisible. Dis, tu as ton ordinateur dans ton sac ? »
Le chevalier : « Oui Max. »
Max : « Tu pourras l’installer sur un rocher comme ça on pourra montrer à Yann ce qu’on a vu quand on est venus sous la pluie d’après la neige. »
Le chevalier : « D’accord. »
Léo : « Max, tu vas quand même pas bidouiller l’ordinateur en mangeant ton chocolat ! »
Max : « Chi 🙂 Regarde Yann. »
Yann : « Ah oui ! Il y avait pas beaucoup de la neige mais c’est tellement rare d’en voir en Bretagne. »
Samuel : « C’est à cause de l’océan. Il est jamais vraiment froid alors il apporte de la chaleur aux terres qui le bordent et il fait pas très froid l’hiver. »
Max : « Oui ben cette semaine là il avait oublié de donner de la chaleur ! -7°C en moyenne ! »
Léo : « La température était plutôt constante. Il y a bien eu un jour à -11°C mais ça a pas duré. »
Max : « J’ai cru qu’on allait geler. Passons aux Hébihens dans les nuages… »
Max : « Inutile de dire qu’on est même pas allés voir. »
Samuel : « On est restés là, sur la côte est de la Pointe du Chevet. Sur quelques dizaines de mètres. Pas plus. »
Max : « Il y avait de la neige sur la plage. Tu te rends compte Yann ? De la neige sur une plage… »
Yann : « C’est original. C’est pas tout le monde qui a vu la neige sur le sable breton 🙂 »
Léo : « On a quand même pu voir quelques roches. »
Max : « Bonome, tu as fini ton sandouich ? »
Le chevalier : « Oui Maxou. »
Max : « Tu veux bien nous aider pour les roches ? Je crois me souvenir que c’est un peu compliqué. »
Le chevalier : « Je vous ai tout expliqué aux Pierres Sonnantes 🙂 Montre. »
Samuel : « Il y a eu l’anatexie. On voit le néosome en blanc et le paléosome en sombre. »
Léo : « C’était quoi comme roche bonome ? »
Le chevalier : « Probablement un gneiss. »
Samuel : « Les silico-aluminates sodiques et potassiques ont fondu les premiers. Ils ont formé un liquide puis ils ont recristallisé en feldspaths. On voit bien. »
Max : « Il est incroyable ce petitours blanc. Il comprend tout et après il explique comme bonome. »
Yann : « Il est bonomisé lui aussi 🙂 »
Léo : « Je crois qu’on peut affirmer que les roches ont été fortement déformées 🙂 »
Max : « Yann, le filon blanc était linéaire lors de sa formation. »
Yann : « Il a bien changé depuis 🙂 »
Yann : « Vous pouvez me rappeler comment ça fait pour fondre ? »
Max : « Le plus simple est de chauffer la roche. Je sais pas si on t’a déjà expliqué que la température augmente avec la profondeur. Selon le contexte, la nature des roches… la profondeur de fusion se situe vers 35 km au minimum. C’est même plutôt 50… »
Yann : « Ça veut dire que ces roches ont été enfouies à 50 km de profondeur avant de revenir à la surface ? »
Samuel : « Ça veut dire ça 🙂 »
Léo : « Pas forcément 50 km. Quand une roche est chauffée alors qu’elle est sous pression, la diminution rapide de la pression peut être suffisante pour la faire fondre du moins en partie. »
Max : « Oui mais ça change pas grand-chose. Ces roches ont été profondément enfouies sous une croûte terrestre épaissie. »
Samuel : « La croûte s’épaissit lors d’une convergence. Soit dans une zone de subduction, soit dans une zone de collision continentale. »
Max : « Yann, la subduction c’est quand la lithosphère océanique plonge sous la lithosphère océanique ou continentale. C’est ce qu’il se passe dans les Antilles par exemple. La lithosphère de l’océan Atlantique plonge sous la plaque caraïbe. C’est ce qui est à l’origine de l’arc volcanique des Petites Antilles. »
Léo : « Ben oui ! Et il y a des tholéiites d’arc ! C’est basaltique ! »
Samuel : « Bien vu cousin Léo ! Ça expliquerait les amphibolites qu’il y a par là ! »
Yann : « Je suis pas tout moi. »
Max : « Laisse les. Ils réfléchissent. Je suis même pas sûr qu’ils comprennent eux-mêmes. »
Léo : « Oui c’est vrai. Je comprends pas tout. Mais tu as raison aussi de dire qu’on réfléchit. Il va bien falloir expliquer tout ce qu’on voit et je serais pas surpris qu’il y ait eu des subduction dans le secteur. »
Max : « Je note 🙂 Foto suivante ! »
Max : « J’avais oublié ce filon de dolérite… »
Yann : « Il y en a vraiment partout dans la région. »
Léo : « Un peu partout en Bretagne 🙂 »
Samuel : « L’altération en boules a donné des boules 🙂 »
Yann : « Ça c’est une roche grenue. »
Max : « Oui Yann. Il n’y a que des cristaux grands de quelques millimètres. »
Léo : « Il y a du quartz, des feldspaths… Mais le noir ? C’est quoi le noir ? »
Le chevalier : « De l’amphibole ? »
Max : « Tu nous demandes ? »
Le chevalier : « Oui 🙂 »
Max : « Mais il est pas possible ce bonome ! Il nous demande à nous, ses petizours…»
Samuel : « C’est un granite ? »
Le chevalier : « Ça y ressemble. »
Léo : « Pour avoir du granite il faut une fusion totale ou presque. C’est très profond la formation du magma granitique. »
Yann : « Si je comprends bien, on va voir des roches qui se sont formées à grande profondeur. »
Samuel : « Tu as bien compris cousin Yann. »
Max : « Ça descend bonome ? »
Le chevalier : « Pas très vite… »
Max : « On va explorer cette île ? »
Le chevalier : « L’Îlot de la Colombière ? Non. Ce n’est pas prévu. »
Léo : « Il y a un panneau. Tu peux le tout zoomer ? »
Samuel : « Ça correspond à la période de nidification ça. Qui niche là ? »
Le chevalier : « Elle 🙂 »
Max : « Une sterne caugek ! »
Yann : « Elle niche sur l’îlot ? »
Le chevalier : « Oui Yann. Eux aussi… »
Léo : « Des goélands argentés 🙂 »
Le chevalier : « Des huîtriers nidifient également sur l’Îlot ainsi que des sternes pierregarins. »
Max : « Je comprends pourquoi il faut pas y aller. »
Samuel : « On est en dehors de la période interdite là. »
Le chevalier : « J’ai d’autres objectifs 🙂 »
Max : « GRÉBU ! IL Y A GRÉBU ! »
Léo : « Il a fait que passer 🙂 »
Max : « Il doit avoir des trucs de grébu à faire… »
Samuel : « Tu as quoi comme objectifs bonome ? »
Le chevalier : « Quelque chose à chercher sur La Petite Roche. »
Max : « Oui ben c’est pas tout de suite. »
Le chevalier : « Venez, je vais vous montrer quelques chose en attendant que la mer descende. »
Max : « Venez, venez… Bien sûr qu’on vient ! On est dans tes poches ! »
Le chevalier : « Tu préfères y aller à pattes ? »
Max : « Ah non 🙂 »
Le chevalier : « Voilà… »
Max : « Oui ben il y a un rocher couché au sol. C’est ça que tu voulais nous montrer ? Un rocher ? »
Le chevalier : « Remonte un peu le temps Maxou. Il y a quelques milliers d’années la pointe était moins érodée. »
Léo : « Et ce rocher était debout sur le sol ! »
Yann : « C’est un menhir ? »
Le chevalier : « Oui Yann. »
Max : « C’est un menhir ça ? Ben ça alors ! Tu veux bien nous fotoer dessus ? »
Le chevalier : « Je veux bien 🙂 »
Max : « On devrait le prendre pour l’offrir à Brindille. Ça ferait bien dans son jardin. »
Léo : « C’est une bonne idée ça ! »
Le chevalier : « D’accord. C’est vous qui le porterez. »
Max : « Bonome ! On est bien trop petits ! Comment tu veux qu’on porte un gros menhir comme ça ? »
Le chevalier : « Parce que tu penses que moi je vais pouvoir le porter ? »
Max : « Ben oui ! Toi tu es très fort 🙂 Tu le mets dans ton sacado. »
Le chevalier : « Non Max. »
Max : « D’accord. Je vais le dire à Brindille ! »
Le chevalier : « Dis-le lui si tu veux. »
Max : « Carrément ! »
Samuel : « Ce serait pas une trace du droit de varech ça ? »
Yann : « Ces traces au sol ? Quel rapport avec le droit de varech ? C’est quoi le droit de varech d’abord ? »
Léo : « Bonome nous a expliqué ça en Normandie. Selon les lieux, les périodes et les législations locales, les paysans pauvres avaient le droit de ramasser tout ce qui traînait sur l’estran. C’est ça le varech. »
Samuel : « C’est la même étymologie que wreck en anglais. Ça veut dire épave. »
Yann : « Qu’est ce qu’ils faisaient avec le varech les paysans pauvres ? »
Max : « Ça dépend. De l’engrais, du combustible pour les plus pauvres… »
Samuel : « Comme ils passaient toujours au même endroit avec leurs carrioles, les roues ont érodé la roche et il y a ces deux traces. »
Yann : « Rholala ! Vous en connaissez des choses ! Même le droit de varech. C’était quand ? »
Max : « Plutôt au Moyen-Âge, vers le 11ème, 12ème siècle. »
Le chevalier : « On va voir la pointe ? »
Max : « On est là pour ça bonome 🙂 »
Yann : « Ça m’a l’air encore bien compliqué… »
Max : « Bonome va nous expliquer tout ça 🙂 »
Le chevalier : « C’est quand même un peu compliqué. Nous sommes face à des pegmatites surmontées de métatexites. »
Max : « D’accord. Et c’est quoi une flegmatite ? »
Le chevalier : « Une pegmatite ? C’est une roche magmatique à grands cristaux. »
Samuel : « C’est pas très difficile. »
Le chevalier : « Non. Ici elles ont la composition d’un granite. Commençons par le haut de la falaise…»
Léo : « Tu peux nous expliquer bonome ? »
Le chevalier : « J’aimerais bien 🙂 La carte géologique parle de gneiss à cordiérite et sillimanite. »
Max : « On a pas montré la traditionnelle vue aérienne ! On est bêtes ! Mais on est bêtes ! Montre la vite bonome ! »
Samuel : « En haut on dirait plutôt un granite. »
Le chevalier : « Tout à fait d’accord 🙂 »
Léo : « On devrait plutôt parler de métatexites. »
Le chevalier : « C’est ce que dit ce petit schéma structural. »
Max : « Est-ce que quelqu’un comprend quelque chose ici ? »
Le chevalier : « Tu parles de notre tribu ? »
Max : « Non non. Du monde entier. Tu crois qu’il y a des géologues qui comprennent ? »
Le chevalier : « Ah oui. Oui, il doit y en avoir 🙂 »
Léo : « Je propose que tu fotoes tout ça et peut-être qu’un jour on trouvera des explications. Je descends faire l’échelle. »
Samuel : « Je descends aussi. »
Max : « On voit quand qu’il y a eu séparation des minéraux. Il y a des lits de feldspaths entre des lits sombres. Je suppose que ce sont les minéraux ferromagnésiens qui forment ces lits sombres. »
Samuel : « Je descends un peu voir les pegmatites. »
Léo : « Fait attention petit Sam. »
Samuel : « Je suis prudent moi 🙂 »
Le chevalier : « Tu peux t’arrêter là petit Sam. »
Le chevalier : « Tu es à la base d’un filon de pegmatite. On voit relativement bien les différents minéraux. »
Max : « Il faut tout zoomer bonome. »
Le chevalier : « Je sais Maxou. »
Le chevalier : « On voit bien les quartz d’un gris translucide, les feldspaths alcalins blancs et un mica blanc. Ce doit être de la muscovite riche en potassium et aluminium. »
Léo : « Et le noir ? »
Le chevalier : « Les pegmatites d’ici sont connues pour contenir de la tourmaline. C’est peut-être ça. »
Max : « Je vais sur les métatexites. Tu me fotoes ? »
Le chevalier : « Oui Max. »
Yann : « On voit des petits plis. »
Max : « Ah bah ça ! Elles ont vécu ces roches ! Elles ont fondues, se sont fait plier… »
Léo : « On peut revoir le contact entre ces migmatites et le haut de la falaise ? »
Le chevalier : « On le voit mieux plus loin. Avancez. »
Max : « Doucement bonome ! On est des minipus nous ! »
Le chevalier : « Petitursus minipus 🙂 »
Max : « Oui ben on est tout petits et on peut pas cavaler comme toi ! »
Léo : « Si on tombe, on tombe de moins haut 🙂 »
Le chevalier : « Avancez un peu les fa dièses ! »
Yann : « Les fa dièses ? »
Max : « Saproblague de musiciens. Le fa dièse est la note la plus près du sol. »
Yann : « 🙂 On est des fa dièses 🙂 »
Le chevalier : « Oui 🙂 Là. C’est bien là. »
Léo : « Oui ben en haut ça ressemble bien à un granite d’anatexie. Fotoe bonome s’il te plaît. »
Max : « Je comprends pas bien ce contact moi. »
Max : « En haut ça a tout fondu mais pas en bas ? »
Le chevalier : « Je ne sais pas Max. »
Max : « Pfff… C’est vrai que c’est pire compliqué que tout ce qu’on a vu jusqu’ici. »
Le chevalier : « Je vous avais prévenus 🙂 »
Léo : « Le schéma structural a raison de parler de complexe migmatitique. Il y a des migmatites et c’est complexe 🙂 »
Samuel : « Plus bas c’est quand même plus simple. Il y a le néosome et le paléosome et puis c’est tout. »
Max : « Et le S de superbonome 🙂 »
Yann : « J’aime beaucoup voir les plis. Ça m’impressionne vraiment. »
Léo : « On revient sur les pegmatites. Mais ils sont pas très grands les cristaux ici. »
Max : « C’est la tourmaline en noir ? »
Le chevalier : « Je pense Maxou. »
Léo : « Bonome, comment tu expliques que les cristaux soient pas grands pareil partout ? »
Le chevalier : « Ce sont des filons de pegmatites. Je suppose qu’ici nous sommes à une extrémité de l’un de ces filons. Le filon est moins épais et il s’est refroidi plus vite ce qui n’a pas laissé le temps aux cristaux de se développer. »
Max : « C’est une bonne hypothèse. Je crois que la mer est descendue. »
Le chevalier : « Oui. »
Max : « Tu vas pouvoir aller sur ton caillou bonomou. »
Le chevalier : « La Petite Roche. »
Samuel : « Qu’est ce que tu veux y voir ? »
Le chevalier : « Vous verrez. »
Max : « Quelque chose me dit que tu vas l’escalader dans tous les sens ce rocher. »
Léo : « Jusqu’à ce que tu trouves ce que tu veux voir. »
Le chevalier : « C’est fort probable. Accrochez-vous bien. Je grimpe ! »
Max : « C’est parti pour le mal de bonome… »
Yann : « Ça secoue un peu quand il grimpe. »
Léo : « Et on se fait crabouiller… »
Max : « Bonome ! QU’EST CE QUE TU FAIS ! TU VAS PAS FOTOER EN GRIMPANT ! »
Le chevalier : « Si 🙂 »
Max : « Il est fou dans sa tête ce bonome ! Il va pas bien lui ! Mais qui m’a fichu un bonome pareil ?! »
Léo : « C’est fini Max. »
Le chevalier : « J’ai trouvé ! »
Max : « Tu as trouvé ? »
Le chevalier : « Oui. J’ai trouvé ! Je progresse moi. Je trouve tout de suite maintenant. »
Max : « Et tu as trouvé quoi ? »
Le chevalier : « Ça ! »
Max : « Ça c’est la Petite Roche bonome et même un aveugle l’aurait trouvée ! Tu progresses rien du tout ! »
Le chevalier : « Regarde bien Max. »
Max : « Je regarde bien bonome. Que dois-je voir ? »
Samuel : « Il y a des minéraux sombres… Ce seraient pas… »
Léo : « DES GRENATS ! C’est ça que tu voulais voir ? »
Le chevalier : « Oui 🙂 »
Max : « Des grenats dans un granite ? C’est possible ça ? »
Le chevalier : « Je ne sais pas trop si c’est un granite, un gneiss ou une anatexite… Mais oui ! Il faut beaucoup d’aluminium et hoplà Regardez ça ! »
Max : « C’est pas avec ces grenats que tu vas faire de beaux bijoux. »
Le chevalier : « Je m’en fiche des bijoux moi ! Il y a des grenats ! »
Max : « Ça c’est mon bonome. Un mauvais sandouich face à la mer et des moches grenats et il est content 🙂 »
Léo : « Yann, bonome aime beaucoup les grenats. On sait pas pourquoi mais c’est comme ça. »
Yann : « Je peux comprendre ça. Bonome, je suis ravi pour toi. »
Le chevalier : « Merci Yann 🙂 »
Léo : « Je peux faire l’échelle ? »
Le chevalier : « Bien sûr Léo 🙂 »
Le chevalier : « Une dernière foto et je redescends. »
Max : « Tu prends pas d’échantillon ? »
Le chevalier : « Hors de question d’abîmer cette Petite Roche. J’ai des fotos et cela me suffira. »
Max : « Mon bonomou 🙂 »
Le chevalier : « On descend et direction les Hébihens. »
Max : « Euh… Il est quand même tard là. On aura le temps ? »
Le chevalier : « En cavalant, oui. »
Samuel : « On pourra pas tout voir… »
Max : « Petit Sam, tu penses pas qu’on a déjà fait beaucoup de belles observations ? On arrivera même pas à tout expliquer dans mon blog. Et l’article va faire 300 pages ! »
Léo : « Il y a pas que ton blog dans la vie Max. On est naturalistes nous. C’est normal que petit Sam ait envie de tout voir. »
Le chevalier : « Je vais faire au mieux. »
Max : « Si tu pouvais éviter de ploufer tes pieds… »
Le chevalier : « Oui Max. »
Yann : « On peut regarder les zoisos en chemin ? »
Léo : « Oh ça oui ! Bonome, écoute ton petitours. »
Le chevalier : « Si vous voulez. »
Yann : « On commence par cette aigrette garzette. »
Max : « Tu sais où tu vas bonome ? »
Le chevalier : « Aux Hébihens. »
Max : « D’accord. Donc tu sais pas du tout. »
Le chevalier : « La journée a été chargée alors maintenant je vais où mes pas me portent. »
Max : « Tu vas pas par là… Dans cette direction c’est l’Îlot de la Colombière. Tu as dit qu’on irait pas. »
Samuel : « La grande île est habitée ? »
Le chevalier : « Il y a quelques maisons. »
Léo : « Il y a un donjon ? »
Le chevalier : « Oui. Construit par Vauban en 1694. »
Max : « Le grand Vauban 🙂 Ça faisait longtemps qu’on avait pas entendu parler de lui. Yann, si tu connais pas le Grand Vauban il faut que tu saches qu’il a construit des forts, des tours, des fortifications un peu partout en France. On peut pas aller quelque part sans tomber sur une construction du grand Vauban. »
Samuel : « Il faisait la poliorcétique. »
Yann : « La polio sceptique ? »
Samuel : « La poliorcétique. C’est l’art de construire ou d’attaquer des fortifications. »
Max : « C’est parce que Louis XIV faisait toujours la guerre alors il a eu besoin d’un commissaire général des fortifications. »
Léo : « Bonome, tu as pas des histoires sur la Pointe du Chevet pendant qu’on marche ? »
Le chevalier : « Une courte anecdote. Nous sommes le 18 février 1807. L’escadrille de Surcouf navigue dans le secteur et elle est prise en chasse par des navires Anglais. »
Max : « C’est qui Surcouf ? »
Le chevalier : « Il fut d’abord corsaire puis armateur-corsaire. Il reçu le grade de capitaine de vaisseau de Napoléon Ier puis la Légion d’honneur. »
Léo : « Un corsaire qui a la Légion d’honneur ? »
Le chevalier : « Léo, j’espère que tu ne confonds pas pirate et corsaire. Un pirate travaille pour son propre compte. Un corsaire a une lettre patente d’un souverain qui l’autorise à attaquer, saisir ou détruire des navires d’une nation ennemie. Il faut dire qu’à l’époque, la flotte militaire française n’est pas très développée. »
Max : « Napoléon a sous-traité la marine à des corsaires ? »
Le chevalier : « C’est un peu ça. »
Samuel : « On revient le 18 février 1807 ? »
Le chevalier : « Oui mon petitours. L’escadrille de Surcouf est donc poursuivie par les anglais. L’un des bateaux, la Clarisse, vient se réfugier dans l’anse. »
Léo : « Oulala ! C’est dangereux ! Il y a des îles et des récifs ! »
Le chevalier : « Oui mais les corsaires ont l’habitude de cet endroit. Ils s’y réfugient souvent. Malgré tout, le temps est vraiment mauvais. Le Vent souffle fort. Les pêcheurs du secteur ne sont pas rassurés pour la Clarisse. D’autant que Le Vent forcit encore. Les amarres de La Clarisse lâchent et le bateau part à la dérive. Il s’écrase contre le rocher de la Charbotière. Seize marins périrent et vingt purent être sauvés. »
Max : « Ben voilà ! Encore des victimes de la guerre avec les anglais ! »
Le chevalier : « Oui Max. »
Yann : « C’est parce qu’il y a pas de four à chauffer les boulets ici. Sinon les anglais auraient eu peur. Le grand Vauban a pas construit un four à chauffer les boulets ? »
Le chevalier : « Non. Pas à ma connaissance. »
Max : « Yann, tu aurais fait un bon assistant au grand Vauban 🙂 »
Yann : « Merci Maxou. Il y a des goélands ! Ce sont… des marins ! »
Samuel : « Oui cousin Yann. »
Yann : « Et ces zoisos au long bec ? »
Max : « Des barges en plumage internuptial… Le plumage est strié. Il y a un long sourcil blanc et le bec est très légèrement recourbé. Je dirais que ce sont des barges rousses. Léo, es-tu d’accord ? »
Léo : « Je suis d’accord. »
Yann (à Max) : « Tu demandes confirmation à Léo ? »
Max : « Oui. Léo est très fort en zoisos. J’aime bien lui demander son avis. Il dit pas souvent des erreurs Léo. »
Léo : « Ça m’arrive parfois. »
Max : « Non Léo. Si tu as un doute, tu le dis et tu demandes à bonome. Tu dis pas des erreurs. »
Yann : « Eux ce sont des courlis. »
Max : « Oui. Des corlieux. Sourcil clair, raie sommitale claire et bec relativement court. Là je suis sûr de moi. Je demande même pas à Léo 🙂 »
Samuel : « Ils se sont envolés. Tu parles trop fort cousin Max 🙂 »
Max : « Pfff ! Ils sont allés quelques mètres plus loin pour voir si il y a plus du manger. Bonome, tu vas vers la Colombière là ! »
Le chevalier : « J’ai suivi les zoisos. »
Samuel : « Un goéland marin a trouvé du manger. »
Léo : « Vous voyez ce que c’est ? »
Le chevalier : « Une araignée de mer couverte d’algues. »
Max : « Tu vois ça à cette distance toi ? »
Le chevalier : « Ben oui 🙂 »
Max : « Et tu dis que tu vois plus rien… »
Léo : « Il a eu peur qu’on lui chipe son repas ! »
Max : « Bonome, tu peux dire aux zoisos qu’on est pas kléptoparasites nous ! »
Léo : « Ah si ! Toi tu es kleptoparasite du chocolat ! Pire qu’un goéland affamé ! »
Max : « Même pas vrai ! Je t’ai chipé ton chocolat qu’une seule fois parce que j’allais faire l’inanition. C’était un cas de force majeure ! »
Yann : « 🙂 »
Léo (à Yann) : « Je constate avec plaisir que tu te rends bien compte de la mauvaise foi de notre cher Maxou. »
Le chevalier : « Inutile d’aller plus loin. Quelques fotos au zoom et demi-tour. »
Samuel : « Les goélands argentés nous crient dessus. On fait demi-tour. »
Le chevalier : « Oui petit Sam. »
Max : « Bonome, c’est quoi ça ? »
Le chevalier : « Des éponges Max. »
Max : « Des éponges ? Ce sont des éponges ça ? »
Le chevalier : « Oui Max. »
Léo : « Tu en sais pas plus ? »
Le chevalier : « Non. Désolé mes petizours. Je ne suis pas spécialisé en Spongiaires. »
Samuel : « C’est dommage ça. »
Max : « Alors on saura pas les éponges ? »
Le chevalier : « Vous ne saurez pas les éponges. »
Max : « On va rester des béotiens des éponges ? »
Le chevalier : « Vous allez. »
Yann : « C’est pas grave. Tu nous apprends déjà des tas de choses bonome. »
Léo : « Avez-vous remarqué que Yann appelle de plus en plus souvent bonome ‘bonome’ ? »
Max : « J’ai bien remarqué 🙂 »
Samuel : « Moi aussi. »
Le chevalier : « Et comment voudriez-vous qu’il m’appelle ? »
Max : « Le grand machin, le grand dadais… Avec un peu d’imagination on pourrait trouver d’autres surnoms encore. »
Le chevalier : « ‘Bonome’ me convient bien 🙂 »
Yann : « Les berges rousses sont toujours là. »
Yann : « Petit cousin, tu as pas donné leur nom en scientifique. »
Samuel : « Limosa lapponica, Scolopacidés. »
Yann : « Merci petit cousin 🙂 »
Léo : « Un goéland marin se pose face au vent… »
Max : « On va sur la grande île ? »
Le chevalier : « Au retour… »
Max : « Là tu vas où tes pieds te mènent 🙂 »
Yann : « On voit le château ! »
Samuel : « Le château de la Roche Goyon ou Fort de La Latte… »
Le chevalier : « Du sommet de la tour Vauban nous verrions qu’il est aligné avec le phare du Cap Fréhel. »
Léo : « Tout bien aligné ? »
Le chevalier : « Oui Léo. Tout bien aligné 🙂 Je vous ai dit que cette tour avait été construite par Vauban ? »
Max : « Oui bonome. »
Le chevalier : « Alors j’ai dit une erreur. Le plan est bien de Vauban mais le maître d’œuvre était l’un de ses élèves : Siméon de Garangeau. »
Max : « Erreur réparée 🙂 »
Le chevalier : « C’était une tour d’artillerie qui protégeait les baies de l’Arguenon et de Lancieux où se jette Le Drouet. »
Max : « Pour éviter que les anglais débarquent. »
Léo : « Bonome, puisque tu en es aux anecdotes, tu sais ce que veut dire Hébihens ? »
Le chevalier : « Hébihens ou Ébihens. Ça vient du breton ‘Enez bihen’ ce qui veut dire petites îles. »
Samuel : « On arrive justement sur une île. »
Le chevalier : « La Nellière… »
Léo : « Tu peux remontrer le schéma structural. J’aimerais savoir où on met les pattes. »
Léo : « Des granitoïdes… A mon avis c’est un terme très vague parce que c’est encore tout compliqué. »
Le chevalier : « Ça doit être ça. »
Max : « Ben oui ! Regardez ce cailloux ! »
Le chevalier : « C’est un granite contenant une enclave d’un autre granite 🙂 »
Yann : « Et là il y a un autre granite… »
Le chevalier : « D’où les granitoïdes du schéma 🙂 »
Max : « C’est quoi un granitoïde bonome ? »
Le chevalier : « Un terme un peu vague qui évite de donner le nom précis de la roche. Cela peut être un granite alcalin, un syénogranite, un monzogranite, une granodiorite… »
Léo : « Des roches difficiles à distinguer à l’oeil nu. »
Le chevalier : « C’est possible dans certains cas mais il vaut mieux étudier des lames minces et les tableaux d’analyses chimiques. »
Max : « Alors granitoïdes c’est bien. »
Yann : « Ça c’est pas un granitoïde. C’est une métatexite. »
Max : « C’est une peu compliqué ce secteur… »
Léo : « On sait que ça a été enfoui en grande profondeur dans une zone d’épaississement crustal genre zone de subduction. »
Samuel : « Mais on sait pas de quand datent ces roches… »
Le chevalier : « Je propose que nous fassions une courte pause. »
Max : « Assis par terre ? »
Le chevalier : « Oui. Assis par terre. »
Léo : « Je suis d’accord moi. »
Yann : « Moi aussi. »
Max : « Petit Sam ? »
Samuel : « Ben oui 🙂 »
Max : « Alors c’est voté ! Tu fotoes la vue. »
Léo : « Je supposes que tu vas nous parler de l’âge des roches de la Pointe du Chevet et des Hébihens. »
Le chevalier : « Oui. En faisant simple. »
Max : « Tu sais faire ça ? »
Le chevalier : « Je vais essayer. En fait nous sommes ici à la limite entre le domaine mancellien à l’Est et le domaine domnonéen à l’Ouest. »
Léo : « Yann, le domaine mancellien fait partie du Massif Armoricain mais il est plutôt à la limite de la Normandie. »
Max : « On l’a observé rapidement en Normandie. Si je dis pas des erreurs il est d’âge briovérien. »
Le chevalier : « C’est ça. Briovérien inférieur et moyen. Les formations de Saint-Cast et du Saint-Malo s’apparente directement au Briovérien inférieur et moyen mancellien. Vous avez pu remarquer un intense métamorphisme voire une anatéxie. Il est possible de remonter aux protolithes malgré tout. Ce sont des formations sédimentaires d’origine détritiques terrigènes : Grès et arkoses, schistes grauwackeux avec quelques horizons de phtanites. Le métamorphisme est croissant vers l’Est. »
Léo : « Vers l’Est ? »
Le chevalier : « Oui Léo. »
Léo : « Ça alors. J’aurais dit vers l’Ouest moi. »
Le chevalier : « Parce que nous n’avons pas encore tout exploré. »
Yann : « Si je comprends bien, il y a eu la sédimentation en bordure du domaine mancellien. »
Le chevalier : « Tu as tout compris Yann et ici c’est la bordure Nord-Ouest du bassin sédimentaire mancellien. »
Max : « Et vers l’ouest on passe au domaine Domnonéen ? »
Le chevalier : « Oui. Au-delà du cisaillement de la Fresnaye-Belle Isle en Terre commence le domaine domnonéen auquel appartiennent les séries profondes du Horst de Plévenon. »
Samuel : « Les amphibolites et les leptynites ! »
Le chevalier : « Exact mon petitours. Elles appartiendraient au Briovérien inférieur. »
Max : « On progresse un peu. Mais on a pas encore vraiment vu le domaine domnonéen…»
Le chevalier : « Un peu quand même. Les diorites que nous avons rencontrées sont datées de 593 millions d’années ce qui les fait appartenir au Briovérien terminal. »
Max : « Oui bonome. »
Samuel : « Tu suis cousin breton ? »
Yann : « Oui. Disons que je suis pas totalement perdu. Merci petit cousin. »
Max : « Je crois que pour bien comprendre il faudrait parcourir toute la côte nord de la Bretagne. »
Le chevalier : « Tu as un peu raison Maxou. »
Léo : « Et si on continuait en mode promenade ? »
Max : « Comment tu parles toi ! »
Le chevalier : « Je suis quand même d’accord avec Léo. J’en ai assez de la géologie compliquée. On se balade. »
Max : « D’accord. On se poche et c’est parti ! »
Samuel : « On profite de la nature, du Vent qui nous caresse le visage. »
Yann : « C’est très agréable. »
Léo : « Oui 🙂 »
Max : « On peut quand même te poser des questions géologiques ? »
Le chevalier : « Vous pouvez… »
Max : « C’est quoi ça ? »
Le chevalier : « Des enclaves basiques mal digérées dans un granitoïde lui même plutôt riche en minéraux ferromagnésiens. »
Max : « D’accord. Je suppose que tu diras rien de plus. »
Le chevalier : « Non. Plus envie. »
Yann : « Tu vas sur la grande île ? »
Le chevalier : « Oui. Pour voir. »
Max : « Et ça tu nous en diras rien ? »
Le chevalier : « Allons voir. »
Max : « Merci bonome. »
Samuel : « Vu d’ici on dirait encore un granitoïde. Mais il fait comme un filon… »
Léo : « Ce serait même pas étonnant qu’il y ait des filons de granites dans les granites… »
Max : « On dirait plutôt qu’il est isolé par des filons. Ce serait pas encore des dolérites ? »
Le chevalier : « La couleur correspond… Mais il faut se méfier des couleurs. »
Samuel : « Et il y a pas l’altération en boules. »
Le chevalier : « Ce n’est pas le seul mode d’altération tu sais petit Sam. »
Léo : « Ici, la mer recouvre bien les roches. Ça doit pas éroder pareil. »
Max : « On voit bien la bordure qui est cuite… »
Samuel : « Il y a des filons de dolérites sur la carte géologique ? »
Le chevalier : « Voyons ça… »
Léo : « Il y en a mais aucun de représenter ici… »
Max : « Nous sommes quand même en présence d’un filon ! Et il est même pas cartographié ! Ça va pas du tout ça bonome ! Comment on fait nous ? »
Samuel : « Moi je pense quand même que c’est un filon de dolérite. »
Léo : « On retient cette hypothèse bonome ? »
Le chevalier : « Oui. Et on rentre. J’en ai plein les pattes moi. »
Il a tout cavalé notre Megapus. En chemin on a trouvé un beau caillou avec le S de superbonome. On l’a pris pour décorer notre chambre. Il mérite bien ça Superbonome 🙂
Et en chevauchant le long de la baie de l’Arguenon, il a pas pu s’empêcher de faire un petit arrêt, histoire de voir si il y avait des zoisos.
Max : « Tu t’arrêtes encore ? Un arrêt imprévu ? »
Le chevalier : « Sur un tel estran il doit y avoir de quoi satisfaire des petizours ornithologues 🙂 »
Léo : « Ça vaut la peine d’aller voir 🙂 »
Samuel : « Juste sur ce rocher bonome. Tu dois garder des forces pour demain. »
Le chevalier : « Oui petit Sam. »
Yann : « Il y a des bernaches cravants ! Des centaines ! »
Léo : « Je dirais plutôt des milliers… »
Samuel : « J’en avais jamais vu autant ! »
Le chevalier : « Elles se rassemblent ici l’hiver, dans les nombreuses baies de la côte. Il n’est pas rare d’en voir des milliers. »
Léo : « C’est quand même impressionnant ! Il y en a partout où on porte le regard. »
Max : « Mais à part ces deux courlis cendrés il y a pas d’autres zoisos… »
Le chevalier : « Je n’ai plus le courage d’observer attentivement. »
Samuel : « Moi non plus. »
Yann : « La journée a été longue et riche. »
Max : « Ben oui ! Les Pierres Sonnantes, La Pointe du Chevet, le menhir, les grenats de La Petite Roche, les Hébihens… Ça en fait des observations. On sature. »
Le chevalier : « Alors on rentre. »
Max : « On rentre ! »
Bonjour Arthur,
C’est dommage que tu ne puisses pas venir avec nous. Je suis sûr que ça te plairait.
Merci pour ton message.
Nous te serrons chaleureusement la patte et gratouillis à Brindille 🙂
Les minipus
Demat les Petitursus minipus !
Grand merci pour ces beaux reportages de vacances !
On a rigolé en lisant que les zoisos « allaient ailleurs voir si ils y étaient », puis revenir « car ils y étaient pas » !
On a rholalaé avec les magnifiques fotos de roches (même le jour où il faisait moche) et avec le diaporama (chut faut pas le dire mais Brindille s’est trémoussée sur la musique 😀 )
On avait les yeux émus devant les fotos de l’écume projetée sur les roches (bravo Chevalier !) et devant les grenats (même moches d’après vous) car on sait combien le chevalier aime les grenats 🙂
On était morts de rire quand Max tu as dit que bonome avait picolé 😀
Et enfin, on a compati avec le chevalier qui a failli tomber 10 fois sur les cailloux ! Oulala faut pas qu’il se re-casse quelque chose !!
Brindille te remercie aussi, Max, pour l’intention de lui rapporter un menhir pour son mini-royaume 😀 Pauvre superbonome !
Gratouillis de la part de Brindille au chevalier et serrage de pattes à tous 3 + Yann 😀
Arthur