Lundi 2 Novembre, An II
Max : « Bonjour bonome, réveille toi, Léo attend à la porte qu’on aille aux zoisos 🙂 »
Le chevalier : « Bonjour Maxou. Va lui dire de patienter alors. »
Max : « J’ai préparé le café et j’en ai pas mis partout 🙂 Dépêche toi quand même ou Léo va partir sans nous. »
Comme on savait pas où aller on est retournés au Royaume des Grèbes. Il est pas très loin ce Royaume et il y a toujours des beaux zoisos. Bonome était pas très enthousiaste à cause du temps. Il faisait gris et c’est pas facile de fotoer quand l’éclairement est faible. Surtout avec le gros zoom. Il risquait même de pleuvoir. C’est pas qu’on aime pas la pluie, c’est bien la pluie pour la nature, mais c’est quand même moins agréable de se promener en étant tout mouillé. Et puis on risque d’attraper le rhume ou la maladie.
Dès notre arrivée au premier observatoire, j’ai aperçu un gros zoiso blanc là-bas tout loin.
Max : « Une aigrette c’est un Ardéidé comme le héron. Ça ressemble beaucoup au héron mais c’est tout blanc. Là on voit bien que le bec est noir alors c’est une aigrette garzette (Egretta garzetta, Ardéidés). Parce que la grande aigrette, en période internuptiale, elle a le bec jaune. J’aimerais bien que tu la vois de plus près cousin Léo. Tu en perdrais encore ta mâchoire 🙂 »
Léo : « Tu te moques encore de moi 🙁 Dis moi plutôt ce que c’est ce petit zoiso qui vient vers nous, là, au bord de l’eau. »
Max : « Heu … Je sais pas trop. On dirait une bergeronnette. Mais j’en ai jamais vu de comme ça. Bonome, tu le connais ce zoiso ? »
Le chevalier : « C’est bien une bergeronnette Maxou, bravo ! Peux-tu nous la décrire ? »
Max : « Elle est grise dessus et jaune dessous. Le bord des ailes est noir et les bordures des plumes des ailes sont blanches. La gorge est claire et il y a un net sourcil blanc. Le bec est fin, un peu long. J’arrive pas à voir si il est gris ou rose. Et la queue est longue. Ça te dit quelque chose ? »
Le chevalier : « Oui Max, mais vous devriez la connaître vous aussi. »
Léo : « On l’a déjà vue ? »
Le chevalier : « Oui, hier je crois. C’est la bergeronnette des ruisseaux, Motacilla cinerea, Motacillidés. »
Léo : « Tu vois Max, j’ai pas répété et j’ai oublié. »
Max : « Ben voilà, c’est de ma faute. Pfff … »
Léo : « J’ai pas dit que c’était ta faute, oulala ! »
Le chevalier : « Regardez les fuligules au lieu de vous chamailler. On dirait des foulques ! »
Max : « On se chamaille même pas. Et ça, c’est des fuligules milouins (Aythya ferina, Anatidés). On voit bien les plumages différents des deux sexes. »
Léo : « Je les connais déjà bien les fuligules milouins. On va ailleurs ? »
On est allés à l’observatoire suivant. Mon cousin et moi on a pris un raccourci pour rejoindre l’observatoire. Nous, on est tout petits et des fois c’est un avantage. On a pu se faufiler sous les grillages et entre les buissons pour aller plus vite. Heureusement qu’on avait mis nos pantalons sinon on se serait piqués les fesses 🙂
Max : « BONOME ! BONOME ! TU NOUS VOIS ? ON EST DÉJÀ ARRIVÉS 🙂 » Mais il y avait pas des zoisos et en plus il s’est mis à pleuvoir… |
Max : « Qu’est ce qu’on va faire ? On va déjà rentrer ? »
Léo : « Oh non, je veux pas rentrer moi. »
Max : « Et si tu nous racontais une histoire en attendant que la pluie cesse. »
Léo : « Oh oui, raconte nous une histoire chevalier ! »
Le chevalier : « Vous voulez que je vous raconte une histoire ? Mais les histoires c’est le soir, avant de dormir. »
Max : « Pfff … Léo il s’endort tout de suite. Il entendrait même pas la fin de ‘Il était une fois‘ … »
Le chevalier : « Max, tu n’es pas gentil avec Léo. Et tu ne t’endors jamais longtemps après lui. Qu’est ce que vous voulez comme histoire ? »
Max : « Tu m’as jamais expliqué pourquoi tu avais souri au vent en Bretagne. »
Le chevalier : « Et tu veux que je te raconte… Mais Léo ne va pas comprendre. »
Max : « Ben si. Je lui ai raconté notre rencontre avec le vent. »
Léo : « Oui chevalier, raconte nous s’il te plaît. Pourquoi tu as souri au vent ? »
Le chevalier : « Pourquoi j’ai souri au vent ? Mais parce qu’il m’embêtait. »
Max : « Il t’embêtait ? Mais comment il pouvait t’embêter. Et tu souris quand on t’embête toi ? Raconte-nous s’il te plaît. »
Le chevalier : « C’était à la Pointe du Château, la pointe sud de la presqu’île du bout de la Bretagne. C’est un endroit magnifique qui vous plairait, j’en suis sûr. Cette pointe est faite de hautes falaises de plus de 60 m qui plongent à pic dans la mer. A un endroit, la pluie, la mer et le vent ont sculpté une forteresse de roche reliée à la falaise par une arche gigantesque. C’est cette forteresse qui est appelée le Château. J’y suis allé un jour de février de l’an II alors que la nature ne voulait voir personne. »
Léo : « Tu es comme elle chevalier. Toi aussi, parfois, tu ne veux voir personne 😉 »
Le chevalier : « 🙂 Le vent soufflait très fort et en rafales. Je pense qu’il atteignait 80 voire 100 km par heure. C’est sa mission de souffler. Et, à la pointe de la Bretagne il vient de très au large. Il n’y a rien pour l’arrêter ou le ralentir. Ce jour là, il faisait son travail de vent avec application, pour que la nature soit tranquille. Je n’ai croisé personne de la journée. Mais ses rafales rendaient la promenade dangereuse. Vous savez, lorsque le vent souffle très fort, il nous pousse, alors pour rester bien droit il faut lutter et se pencher dans sa direction. Mais quand il faiblit, on est déséquilibré et on risque de tomber. Il me semblait plus raisonnable de ne pas trop m’approcher de la falaise. Je voulais faire des photos du Château. Mais les rafales faisaient que je n’arrivais pas à être assez stable pour y arriver. Je ne pouvais pas faire de promenade, pas faire de photos … Le vent m’embêtait alors je lui ai souri. »
Max : « C’est bizarre comme réaction. Tu aurais pu lui en vouloir. »
Le chevalier : « Non Max. Il faisait son travail de vent. Je n’avais pas à lui en vouloir. Et tu sais bien que la nature est belle même quand les conditions sont difficiles. En lui souriant je voulais qu’il sache que je le comprenais et que je ne lui en voulais pas. La Bretagne est son territoire, pas le mien. »
Léo : « Et qu’est ce qu’il a fait ? »
Le chevalier : « Il a apporté des nuages pour qu’en plus de vent, il y ait la pluie. Une pluie battante, cinglante, froide … Mais j’ai continué ma promenade pour profiter de la beauté du paysage, des vagues qui battaient contre le pied de la falaise et des oiseaux. Ils sont très impressionnants. J’aimerais que vous les voyiez un jour, ces oiseaux de mer qui surfent sur le vent, planent sur place ou se chamaillent comme si de rien n’était. J’en ai même vu qui volaient à reculons tellement le vent soufflait. Bien évidemment j’étais seul sur cette Pointe. J’étais trempé, j’avais froid mais j’étais bien. Vraiment bien. Et je cheminais sur les chemins. Alors le vent a soufflé encore plus fort, comme pour me chasser. Là, j’avoue que j’ai renoncé à la promenade. Je me suis découragé et je suis retourné à ma monture en pataugeant dans les flaques et la boue. J’ai chevauché vers la cabane où je logeais mais, en chemin, un autre site m’a attiré. Un endroit encore plus beau, encore plus sauvage. Une plage magnifique, immense et déserte. Alors j’ai arrêté ma monture et je suis allé m’y balader. »
Max : « Le vent a dû se fâcher très fort contre toi. »
Le chevalier : « Non, Maxou, au contraire. Devant mon obstination à vouloir profiter de la nature, mon admiration pour sa force et sa beauté, le vent a renoncé à me chasser. La nature avait compris que, moi non plus, je ne voulais voir personne et que je ne l’embêterai pas. Le vent s’est un peu calmé et a éloigné les nuages pour qu’ils laissent la place au soleil. Et, tous les deux, ils m’ont séché. Le vent m’avait accepté sur son territoire. Sur le moment je n’ai pas pensé à le remercier mais je lui ai souri encore et encore. J’étais seul sur une plage immense avec la Pointe des Tas de Pois à ma gauche et la Pointe du Toulinget à ma droite. Vu de loin je devais paraître minuscule, à peine plus grand qu’un grain de sable. J’ai adoré ce moment et je l’ai prolongé le plus longtemps possible. »
Max : « Tu n’avais pas envie retourner à ta cabane 🙂 »
Le chevalier : « Oh non ! Mais vous connaissez bien ce sentiment. Je pense que si vous aviez été là vous auriez demandé à faire une pause. Je me serais assis sur le sable et je vous aurais fait un câlin en vous grattant le front. Vous n’auriez pas eu envie de quitter cette plage. Mais le soleil commençait à baisser sur l’horizon. Il n’allait pas tarder à tomber dans la mer. Alors je suis parti à contre cœur mais, au moment de quitter la plage, je me suis retourné une dernière fois pour sourire au vent et lui dire merci. Tu sais, s’il n’avait pas soufflé si fort ce jour là, cette promenade aurait été plus calme, plus confortable mais aussi plus banale et je n’en garderais pas un si beau souvenir. Je sais ce que je lui dois. »
Max : « Et il se souvient d’un jour où un chevalier lui a souri 🙂 »
Le chevalier : « Je suis certain qu’il se souvient aussi qu’un autre jour un petitours l’a écouté 🙂 »
Léo : « Dis chevalier, tu nous emmèneras voir le vent en Bretagne ? J’aimerais bien le rencontrer. »
Max : « On peut le voir partout, le vent. Même ici. Mais c’est une bonne nouvelle qu’il souffle pas, ça veut dire que la mer va bien. »
Le chevalier : « J’aimerais vous emmener en Bretagne. Mais avant ça, il faut que nous te fassions découvrir la mer, Léo. »
Léo : « Oui ! Quand est-ce qu’on va à la mer ? »
Le chevalier : « Aux prochaines vacances. C’est promis. Dites les petizours, la pluie s’est arrêtée. On va aux zoisos ? »
Max : « On y va ! »
En chemin, on voyait pas des zoisos mais d’un coup bonome s’est arrêté. Ses superzoreilles avait détecté quelque chose. Elles sont bizarres ses oreilles mais elles fonctionnent bien 🙂 Il a analysé le bruit et en a déduit que c’était le bruit de dents qui rongeaient un fruit à coque dure. Et, selon lui, ça voulait dire qu’il y avait un écureuil pas loin. Oui Princesse. Je t’assure que c’est ce qu’il a dit. Il reconnaît les écureuils à l’oreille si ils sont à moins de 10 mètres. On avait jamais vu des écureuils alors Léo et moi on savait pas ce qu’on cherchait. Un mammifère avec une grosse noix dans les pattes. Mais c’est bonome qui l’a trouvé.
Max : « Oh ! Qu’il est beau ! Fotoe-le vite, il se cache. »
Léo : « Il croit qu’on veut lui chiper son repas ! »
Max : « On est zoophages nous, on va pas te voler ta noix ! »
Le chevalier : « Ne lui dites pas que vous êtes zoophages, il va croire que vous voulez le manger ! »
Max : « N’aies pas peur écureuil. On mange que du chocolat ! »
Léo : « Il s’appelle comment en scientifique ? »
Le chevalier : « Sciurus vulgaris, Sciuridés. Il fait partie du grand groupe des rongeurs. Ses incisives lui permettent de découper la coque des noix, des noisettes … Elles s’usent régulièrement mais poussent aussi régulièrement. Le problème est que si l’une d’elles vient à se casser, celle qui lui fait face ne s’use plus. Elle pousse donc régulièrement, le gène puis l’empêcher de manger. Et elle finit pas lui percer le crâne ou le palais et il meurt. »
Max : « Mais c’est terrible ça ! Il faut créer des dentistes pour rongeurs bonome. On peut pas laisser les écureuils mourir à cause de problèmes dentaires. Ça va pas du tout ça. Tu écris un rapport et tu l’envoies à Princesse. »
Léo : « Dis chevalier, tu parles l’écureuil ? »
Le chevalier : « Pourquoi me demandes-tu ça ? »
Léo : « Ben, j’ai pas eu le temps de bien l’observer. Tu pourrais leur demander de venir pour tes petizours ? »
Le chevalier : « Je vais voir ce que je peux faire 🙂 »
Après l’écureuil, on a repris notre promenade. Mais il y avait pas des zoisos dans les sous-bois 🙁 Ils devaient tous être au Royaume Secret. Il faudrait qu’on le trouve celui là. Alors on a avancé jusqu’à un observatoire. Et on a vu grébu 🙂
Léo : « Podiceps cristatus, Podicipédidés. C’est le grèbe huppé, celui que vous surnommez grébu. Je l’aime bien ce zoiso. Oh ! Qu’est ce qu’il fait ? »
On a pas bien compris. Il s’est étiré les ailes sur l’eau, puis il est allé faire trois pas sur la berge et il est retourné dans l’eau. Peut être qu’il voulait gronder le foulque parce qu’il en a assez de voir les foulques se chamailler. Le foulque, il a rien dit. Il a juste eu l’air surpris de cette visite express inopinée. Mais bon, ça nous a donné l’occasion de voir grébu hors de l’eau. C’est très rare de le voir sur la berge. Cet été on l’a vu sur son nid, au moment ou les parents se passaient le relais pour couver. On a pu observer les pattes très en arrière du corps ce qui fait que les grèbes se tiennent presque verticalement quand ils marchent.
Et il est tout mignon : il donne envie de le caresser. Mais il faut jamais caresser les zanimos sauvages. C’est pas des jouets.
Puis une autre bergeronnette est venue nous voir. Elle ressemblait pas tout à fait à celle de tout à l’heure alors on a demandé des explications à bonome.
Max : « Cette bergeronnette est bien grise dessus donc c’est une Motacilla cinerea parce que cinerea ça veut dire gris en langue ancienne que personne connaît. Mais tout à l’heure, elle était bien jaune dessous. Là, il y a que l’arrière qui est jaune. Le devant est gris. Comment tu expliques ça ? »
Le chevalier : « Le plus simplement du monde : c’est un juvénile qui va vers son premier hiver. »
Léo : « On aurait pu y penser ! »
Max : « REGARDEZ ! VITE ! UNE AIGRETTE GARZETTE VIENT DE SE POSER ! »
Le chevalier : « Tu cries en chuchotant toi ? »
Max : « Je crie parce qu’il y a une aigrette qui vient de se poser et je chuchote pour pas qu’elle se sauve alors, oui, je crie en chuchotant ! MAIS JE PEUX TE CRIER TRÈS FORT DESSUS SI TU VEUX ! »
Léo : « Max, arrête tes bêtises et regarde l’aigrette garzette. Egretta garzetta, Egretta garzetta, Egretta garzetta … Oh ! Elle a fait caca ! »
Max : « Elle a clairement exprimé ce qu’elle pensait de ton habitude de répéter les noms en scientifique des zoisos 🙂 »
Le chevalier : « 😀 Max, tu n’es vraiment pas gentil avec Léo. Laisse le apprendre. Sa méthode est très efficace et il a raison de dire que l’apprentissage est fondé sur la répétition. »
Max : « Ben voilà, elle est partie 🙁 »
Léo : « J’ai vu une aigrette garzette de tout près ! J’ai vu une aigrette garzette ! On voit plein de beaux zoisos avec vous et des beaux zanimos. Merci de m’avoir gardé avec vous. »
Max : « Ce qui m’étonne c’est que ta mâchoire ne soit pas par terre ! »
Léo : « Tu m’embêtes. Je te parle plus. Chevalier, on avance ? »
Bonome a tenu à aller au bord de l’eau. Il nous a mis dans sa poche pour pas qu’on se fasse piquer par les branches et les ronces. Il espérait voir un râle d’eau. Il sait qu’il y en a dans ce Royaume mais il les a jamais observés. Du coup, moi non plus. Mais on l’a pas vu. On a vu un héron cendré qui s’envolait et se posait plus loin (Ardea cinerea, Ardéidés).
Grâce à sa calotte blanche on a su que c’était un adulte. Mais il avait pas envie de nous voir alors il s’est encore envolé et il est parti. Alors bonome a dit que c’était le moment de partir pour nous aussi. On s’est juste arrêtés au dernier observatoire, là où Martin vient nous voir. Mais c’était pas l’heure de notre rendez-vous. Il est pas venu. A la place on a vu un grèbe huppé. Il s’est étiré une patte, comme ça.
On a pu voir ses doigts palmés. Ils sont gentils les zoisos. Lors de notre précédente promenade, bonome nous a expliqué les Podicipédidés. Les pattes en arrière du corps, les doigts palmés … Et aujourd’hui les grébus nous ont montré ces caractéristiques. Quand je dis qu’il parle le zoiso ce chevalier …
Voilà Princesse, peut être que tu t’en fiches de nous mais je t’embrasse quand même.