Lundi 21 Septembre, An II
« Bonjour Max, as-tu bien dormi ? »
« Oui bonome, j’ai rêvé de Martin. On va aux zoisos aujourd’hui ? Tu m’emmènes où ? »
« Que dirais-tu d’aller aux Royaumes des Bernaches et des Pics ? »
« D’accord. J’espère qu’on verra la grande aigrette. J’aime bien ce grand zoiso. »
Le Royaume des Bernaches commence par un beau marais qu’on peut observer depuis trois endroits différents. On commence toujours nos promenades par ces points d’observations. Mais aujourd’hui, il y avait pas beaucoup de zoisos dans Le Marais. Quelques mouettes rieuses et des foulques mais on allait pas rester des heures à regarder des mouettes et des foulques. On connaît bien ces zoisos. Alors on est pas restés au Marais et on est allés à l’étang voir si il y avait plus de zoisos.
Et il y en avait pas vraiment plus. C’est bizarre les Royaumes : certains jours il y a plein de zoisos et d’autres jours il y en a presque pas. Je sais pas où ils vont quand on les voit pas. Il doit y avoir un Royaume Secret, quelque part, où les zoisos vont se cacher quand ils veulent pas qu’on les voit. J’aimerais bien le trouver ce Royaume Secret. Ça doit être le paradis des ornithologues.
En vérité, quand je dis qu’il y avait pas de zoisos, c’est pas tout à fait vrai. Il y en a toujours mais comme on a l’habitude de les voir, on les regarde moins. Mais c’est pas bien. Ils sont beaux quand même les zoisos habituels. Là, on a vu un héron cendré (Ardea cinerea, Ardéidés). Il a pris des poses de héron, sûrement pour nous donner quelque chose à voir d’intéressant.
D’abord, il s’est étiré un peu. On voit bien sur la foto qu’il s’étire l’aile et la patte vers l’arrière. Et il est sur une seule patte. Souvent, les zoisos dorment debout sur une seule patte. Ça repose l’autre. Je pense qu’il venait de se réveiller le héron. Et comme il faisait beau, avec beaucoup de soleil, il en a profité pour se réchauffer. Pour cela, il se met face au soleil et il ouvre les ailes vers le bas. Le fotoeur du Royaume des Sternes appelle cette position la parabole. C’est pas bête. A ma connaissance, il y a que le héron qui se réchauffe comme ça, mais je connais pas les comportements de tous les zoisos moi.
Puis on a vu grébu (Grèbe huppé, Podiceps cristatus, Podicipédidés). J’espère que je te lasse pas avec mes grébus. C’est important de dire ce qu’on voit à chaque fois qu’on va dans un Royaume parce que, si on disait pas, on saurait pas que les zoisos sont là et on pourrait croire que le royaume va pas bien. Et puis là, on l’a fotoé alors qu’il s’ébrouait. C’est rigolo un grébu qui s’ébroue 🙂
Après bonome s’est arrêté face à une roselière. Il y avait pas de zoisos et il attendait, il attendait, il attendait … Moi, j’en avais assez de rester sans voir de zoisos alors je ronchonnais. Mais il m’a dit d’être patient, très gentiment. De toutes façons, on avait pas vu grand chose depuis notre arrivée alors pourquoi pas rester immobiles, pour voir si on aurait une surprise. Et j’ai encore ronchonné. Et puis son cœur s’est arrêté … Je crois qu’il a même arrêté de respirer mais il s’est mis a fotoer. J’ai pas vu tout de suite.
« Bonome, dis moi que je rêve pas … Page 81 de mon beau livre, troisième ligne, c’est ça ? C’est bien ça ? C’est lui, là, devant nous ? Bonome, c’est pour ça que tu attendais ? … Réponds moi s’il te plaît. C’est bien LUI ? »
« Oui, c’est bien lui 🙂 »
« Tu le fotoes bien, hein, bonome. Le rate pas s’il te plaît. C’est lui. C’est le blongios nain ! Bonome, on voit un blongios nain !!! »
« 🙂 oui mon petitours, nous sommes bien en présence d’un blongios nain (Ixobrychus minutus, Ardéidés). D’après son plumage, je dirais que c’est un juvénile ce qui laisse penser que ses parents ne sont pas loin et qu’il y a eu reproduction cet été. C’est une excellente nouvelle. »
« Tu savais qu’il était là ? C’est bien lui que tu attendais ? »
« J’ai cru entendre qu’il était présent et comme il vit dans les roselières je me suis dit que ça valait la peine de le guetter. Tu ne m’en veux pas trop de t’avoir faire patienter quinze minutes ? »
« Je te demande d’excuser ma bêtise qui m’a poussé à ronchonner au lieu de te faire confiance 🙂 »
« J’espérais te faire une belle surprise. Tu es excusé petitours. As-tu remarqué comme il se déplace dans les roseaux (qui sont en réalité des phragmites) ? »
« C’est très impressionnant. Il s’accroche aux tiges des phragmites qui fléchissent à peine. Il est fort ce zoiso. C’est dommage qu’il soit si loin. »
« C’est un oiseau très farouche qui se réfugie dans les roselières au moindre bruit. Il s’est plutôt bien montré tu sais. »
« Je sais bien mon bonome. Il est très rare et on a beaucoup de chance de l’avoir vu mais j’aurais aimé pouvoir mieux l’observer. Bon, là il s’est bien caché. Il ne ressortira plus de sitôt. On avance ? »
On a passé le pont pour aller au Royaume des Pics et on a fait une pause. Moi, j’ai fait comme le héron : je me suis assis et j’ai pris le soleil. J’ai même enlevé mon sacado. Bonome s’est moqué de moi parce que j’avais un sourire béat à cause du blongios nain 🙂
Mais la pause a pas duré longtemps parce que j’ai aperçu une jolie petite fleur rouge. Le botaniste a repris le dessus.
« Tu me présentes à cette jolie plante à fleurs. »
« Si je te dis que c’est une de mes amies, vas-tu te moquer de moi ? »
« Non, je te connais maintenant. Je sais bien que tu as des tas d’amis végétos 🙂 Et puis, c’est une petite plante discrète. C’est tout à fait ton genre. Allez, botanise bonome. »
« Les pétales sont soudés entre eux à la base et les cinq étamines sont soudées aux pétales … Les feuilles sont opposées … On ne voit pas l’ovaire mais je sais, d’après ce que je connais du fruit, qu’il n’est pas divisé … Les étamines sont attachées en face des pétales et il y a un style et un stigmate. C’est la famille des Primulacées. »
« Je connais pas. »
« Les feuilles sont opposées … »
« Déjà dit ! »
« Le limbe de la feuille est attaché directement à la tige donc il n’y a pas de pétiole … Les pétales sont plus longs que les sépales … Et les feuilles font plus de 4mm de largeur. C’est le genre Anagallis. »
« C’est long la botanique … »
« Tu en as assez ? »
« Non, mais je retiens pas tout ça moi 🙁 »
« Moi non plus Max. Je lis ma flore. C’est la méthode qui compte. Apprends à te servir de ta flore, mémorise quelques plantes et tu seras un grand botaniste. »
« Tu continues ? »
« Il y a trois espèces du genre Anagallis mais une seule est commune : c’est celle-ci Anagallis arvensis. J’aurais aimé te montrer son fruit. C’est une petite sphère translucide qui contient quelques graines. A maturité il s’ouvre en deux au niveau de son équateur. »
« Elle est très belle cette petite fleur. »
« Oui. Il en existe des bleues, de la même espèces. Elles sont plus rares mais je les trouve encore plus belles. »
« Elles sont bleues parce qu’une fée les a arrosées de ses larmes ? »
« Tu te souviens de cette légende petitours ? »
« Je relis parfois mon blog pour me souvenir de toutes les belles choses que tu me montres, pour réviser un peu et revoir la mer et ses zoisos. Les Fontaines Bleues étaient magnifiques. C’est un très beau souvenir. Merci mon bonome. »
On a avancé un peu, tranquillement, en nous remémorant nos vacances à la mer, la Charmante Petite Ville et Samuel de Champlain, le surf sur l’os de seiche, l’Île Où On Va à Pieds … Et puis le vent. Il me manque, le vent. J’aimerais qu’il me raconte encore la mer. Je regrette d’être pas resté plus longtemps à l’écouter. Les barges nous auraient attendus. Ici, il y a pas de vent. Bonome dit que c’est parce que la mer va bien, le vent a pas besoin de donner de nouvelles. N’empêche qu’il me manque ce petit vent du jour. Maintenant je sais que lorsqu’on apprécie quelqu’un il faut en profiter parce qu’on sait pas quand on va le revoir. Bonome a vu que j’étais un peu triste alors il m’a pris dans ses bras tout en marchant et puis on a vu d’autres jolies fleurs.
« C’est qui ces jolies fleurs ? Elles poussent très tard. Oulala. Elles n’ont pas peur de prendre froid en cette saison ? »
« 🙂 il y a deux espèces qui se ressemblent : ce sont les crocus et les colchiques. »
« Comment on les distingue ? »
« Méthode simple ? »
« Oui 🙂 »
« Les crocus sont des fleurs de printemps alors que les colchiques fleurissent à la fin de l’été. »
« Alors ce sont des colchiques 🙂 »
« Des colchiques d’automne (Colchicum autumnale, Colchicacées). Ce sont des plantes toxiques en raison de la présence d’une molécule qu’elles contiennent : la colchicine. Même à très faibles doses, la colchicine bloque les multiplications cellulaires, ce qui provoque des picotements dans les doigts et les orteils, la perte de cheveux et de poils … Si l’ingestion se poursuit, la mort s’en suit. »
« Encore une plante tueuse. Tu veux toujours pas mettre de panneaux pour prévenir les zanimos et les zoms ? »
« Max … »
« Oui, ben si il y a des accidents, ça sera pas ma faute. »
« D’accord, je transmettrai ta proposition à Princesse. Sinon, connais-tu le nom vernaculaire des crocus ? »
« Non mon bonome. »
« C’est le safran ! Il est cultivé dans d’immenses champs et les pistils à trois longs stigmates sont prélevés à la main et servent à parfumer certains plats. »
« Oui, ben j’espère qu’ils se tromperont pas et qu’ils prélèveront pas des pistils de colchiques sinon il va y en avoir des accidents. »
« Petitours, si tu n’arrêtes pas de ronchonner je te fais une mousse au chocolat au colchique. »
« Pas d’accord. Tu gâches pas le chocolat, c’est trop bon. ET JE RONCHONNE SI JE VEUX. »
« Oui chonchon 😉 Veux-tu que je te présente cette plante à fleurs jaunes ? »
« Bien sûr mais tu essayes de faire court s’il te plaît. »
« C’est une fleur à pétales soudées en un tube terminé par deux lèvres. Il y a quatre étamines : deux grandes et deux petites. Elles sont soudées aux pétales. Je pense que c’est suffisant pour caractériser la famille des Scrophulariacées. Cette plante est la linaire vulgaire (Linaria vulgaris). Le genre Linaria a été créé en hommage à Karl von Linnée qui était un grand naturaliste du 18ème siècle. C’est lui qui a inventé la façon que nous avons encore de nommer les êtres vivants. On l’appelle la classification binominale : chaque espèce a un nom en deux parties. La première indique le genre et la seconde précise l’espèce. »
« Tu en connais des choses mon bonome. Dis, tu veux bien me présenter cette autre plante à fleurs et après on retourne à l’étang voir si le blongios nain veut bien ressortir. »
« Dis donc petitours, tu te spécialises en botanique. »
« J’ai appris mes leçons moi. Je sais bien que chaque jour la température et l’éclairement diminuent ce qui fait que les êtres vivants vont devoir s’adapter. Les plantes vivaces vont perdre leurs feuilles ou leurs parties aériennes et les plantes annuelles vont mourir. Alors il faut profiter des belles fleurs tant qu’il y en a. Après, il va falloir patienter jusqu’au printemps pour en revoir. »
« Tu m’impressionnes Max. Cette famille est facile à reconnaître, si tu te souviens de ce qu’est un calicule. »
« C’est comme un petit calice autour du calice. Les Rosacées peuvent avoir un calicule. »
« Très bien ! Chez les Rosacées le calicule comporte 5 sépalules. Ici il n’y en a que trois et ils sont libres entre eux. C’est donc la famille des Malvacées et le genre Malva. Une autre caractéristique de cette famille est que les étamines sont très nombreuses et soudées en un tube autour du pistil. Si je ne dis pas d’erreur cette plante est la mauve alcée (Malva alcea, Malvacées). On va aux zoisos ? »
« On y va bonome. »
Bon, on a pas revu le blongios nain. Il devait être tout caché dans la roselière. Mais c’est pas grave parce qu’on déjà eu beaucoup de chance de le voir tout à l’heure. A la place du blongios nain, on a vu des cormorans qui faisaient des attitudes de cormoran. En scientifique le cormoran s’appelle Phalacrocorax carbo, Phalacrocoracidés. Je t’ai déjà expliqué qu’il a pas de glandes uropygiennes. Tu sais, les glandes qui contiennent du gras que les zoisos aquatiques s’étalent sur les plumes pour être imperméables. Le cormoran, il en a pas. Je sais pas bien pourquoi. Peut être qu’il est arrivé en retard à la distribution des glandes uropygiennes aux zoisos aquatiques et qu’il y en avait plus pour lui. Bon, toujours est-il qu’il est pas imperméable : il prend l’eau. Alors il doit se faire sécher. Ça, je te l’ai déjà montré. Mais avant de sécher, il faut qu’il s’envole à partir de l’eau.
En général, avant de s’envoler, il se secoue les ailes et les étend comme tu vois sur la foto. Il sèche un peu comme ça et puis il se met face au vent et prend son élan en battant des ailes et en courant sur l’eau. Et après il vole. Là, on a pas réussi à fotoer son envol mais un jour, on y arrivera. Par contre, on a réussi à capturer l’amerrissage sur étang. Peut être qu’il faut dire ahétanhissage ? C’est très beau aussi.
Avant de partir, en jetant un dernier coup d’œil à la roselière pour voir si blongios était visible, j’ai aperçu un machin qui dépassait de l’eau. J’ai demandé à mon bonome de fotoer et de m’expliquer.
« C’est quoi ça bonome ? »
« Ça, mon petitours, c’est une tortue de Floride. »
« Meu non, c’est pas possible. On est ici nous, et les tortues de Floride, ça vit en Floride, pas ici. Tu dis des erreurs bonome. »
« Non Max, je ne dis pas des erreurs. C’est une tortue de Floride (Trachemys scripta elegans, Emydidés). »
« Et qu’est ce qu’elle fait ici, alors, cette tortue de Floride ? Elle a pris l’avion pour venir en vacances au Royaume des Bernaches ? »
« Non Max, c’est à cause des zoms. »
« Encore à cause des zoms ? Qu’est ce qu’ils ont fait encore comme bêtises ? Vas-y explique moi. »
« Tu sais Max, quand elle est petite, la tortue de Floride est très mignonne. Elle a une jolie tache rouge sur la tête et elle amuse les enfants. Mais elle grandit. Elle grandit même beaucoup. Et elle mange de la viande. Et puis elle n’amuse plus les enfants et les parents en ont assez de payer de la viande à la tortue. »
« Oui, je vois. Quand elle amuse plus personne, on la jette dans l’étang pour s’en débarrasser. Ni vu, ni connu, débrouille-toi la tortue. Et pour se donner bonne conscience on se dit qu’elle est mieux là que dans son aquarium. C’est ça ? »
« Tu as tout compris Max. »
« Et elle dévore tout ce qu’elle trouve et elle embête les zanimos d’ici. »
« Oui Max. Mais heureusement qu’elle ne se reproduit pas ici. » (En fait, si, elle se reproduit dans ce Royaume et probablement dans d’autres…)
« C’EST QUAND MÊME PAS UNE RAISON POUR ABANDONNER SA TORTUE DANS UN PARC !!! ZUTALOR !!! »
N’empêche que j’aimerais bien trouver une carapace de tortue, ou son crâne, pour ma collection 🙂
« Voilà Max, la promenade est terminée. Nous arrivons à notre monture et il va falloir rentrer. »
« J’ai pas envie 🙁 »
« Tu n’as pas envie ? »
« Non, j’ai pas envie de rentrer. Et je sens bien que toi non plus. Et si on allait en mission dans un autre Royaume ? Il est encore tôt. Il fait beau. Tu veux bien ? S’il te plaît. Au royaume des Grèbes par exemple. On peut faire un tour rapide, juste pour voir si tout va bien. Allez, s’il te plaît … »
« Cela te ferait vraiment plaisir ? »
« Oh oui mon bonome. S’il te plaît … »
« Un petit tour rapide ? »
« Très rapide. »
« On y va ? »
« On y va 🙂 »
Alors on y est allés. Il a fallu chevaucher d’un Royaume à l’autre. Moi, je souriais béatement et bonome s’est moqué de moi, affectueusement, parce que j’avais un sourire jusqu’aux oreilles à cause qu’on allait encore se promener. J’aime beaucoup le Royaume des Grèbes. Et j’aime beaucoup me promener dans la nature parce qu’on voit toujours de belles choses.
« Bonome, c’est qui cette Astéracée ? Elle a des fleurs blanches en languettes autour et des fleurs jaunes en tubes au centre. C’est une radiée. Mais laquelle ? Tu sais toi ou on demande à Gaston ? »
« Comme tu veux Max. »
« Oups, j’ai laissé ma flore sur le bureau. C’est toi qui expliques alors. Je t’écoute, ô maître 🙂 »
« Max, tu te moques de moi. Ce n’est pas bien de se moquer de son bonome. Sans la flore, je vais avoir du mal à justifier ma diagnose … Il y a des fleurs en tubes au centre … Les feuilles n’ont pas de pointes piquantes. Tu ne te feras pas piquer les fesses 🙂 Les fleurs en tubes sont jaunes et les fleurs en languettes sont blanches et en une seule rangée … Le capitule n’est pas bombé … Je dois oublier des étapes mais je dirais que c’est un Aster, probablement Aster Novi-Belgii. »
« Aster ? Comme dans Astéracées ? »
« Oui Max mais tu le sais bien. Le nom d’une famille est construit à partir du nom d’un genre très représentatif de cette famille. »
« Faut que tu me ré-expliques tout ça bonome. J’ai le cerveau qui a fondu à cause du soleil 🙂 »
« Et pourtant, tu mets ta casquette 😉 Je vais commencer avec une famille d’oiseaux que tu connais bien : les Ardéidés. Nous en avons vu plusieurs espèces : les hérons cendrés et pourprés (Ardea cinerea et Ardea purpurea), l’aigrette garzette (Egretta garzetta) et la grande aigrette (Casmerodius albus). »
« Tu oublies le bihoreau gris (Nycticorax nycticorax) et le blongios nain (Ixobrychus minutus) 🙂 »
« Nous pouvons les ajouter. Les hérons cendrés et pourprés se ressemblent tellement qu’ils ont été placés dans le même genre : le genre Ardea. Les autres espèces que nous avons citées ressemblent aux hérons mais pas assez pour être dans ce genre. D’autres genres ont été créés. Mais comme tous ces oiseaux ont une forme de héron (cou long, corps long, pattes longues et non palmées), les différents genres sont placés dans une même famille dont le nom est construit à partir du nom du genre le plus emblématique de la famille. Comprends-tu petitours ? »
« Oui bonome. Et les familles sont rassemblées elles aussi. C’est ça ? »
« Tout à fait. Il y a d’autres familles qui rassemblent des oiseaux ressemblant aux hérons. Nous les avons observées. Ce sont les Ciconnidés et les Threskiornithidés. Ces trois familles forment l’ordre des Ciconniformes. »
« D’accord, on retrouve des groupes dans des groupes dans des groupes … Et les végétos ? »
« Le principe reste le même. Il y a, par exemple, plusieurs espèces du genre Aster. Mais nous avons vu d’autres plantes qui leur ressemblent comme l’inule faux-crithme (Inula crithmoides) ou le cirse des champs (Cirsium arvense). Ces genres forment, avec bien d’autres, la famille des Astéracées. »
« J’ai un problème bonome. Pourquoi les familles de zanimos se terminent toujours pas -idés et les familles de végétos par -acées ? »
« J’ai un problème petitours. Je n’en sais rien. »
« HONTE SUR TOI GRAND CHEVALIER 🙂 Merci bonome pour tous ces renseignements … Oups, il y a une autre Astéracée juste là. Au boulot. Diagnose, tout ça tout ça. »
« Et si c’était toi qui commençais ? »
« Si je dis des erreurs tu me jettes dans l’étang ? »
« Oui 🙂 et tu nourris les brochets. »
« C’est pas drôle. J’ai peur des brochets moi 🙁 »
« Max. »
« Quoi 🙁 »
« Tu me manquerais énormément si tu disparaissais. Alors si un brochet te gobait, je plongerais et je le découperais pour te récupérer et ensuite je jetterais ses morceaux à grébu et à Martin pour qu’ils les mangent. »
« 🙂 🙂 🙂 Alors cette Astéracée pique pas les fesses. Elle a des fleurs en tubes et des fleurs en languettes de la même couleur … C’est quoi la suite ? »
« Simple ou compliqué ? »
« Simple bonome, simple. On est là pour un petit tour rapide. »
« C’est un Séneçon. Il en existe une vingtaine d’espèces en France. D’après les feuilles, je dirais que c’est le séneçon à feuilles de roquette (Senecio erucifolius, Astéracées). »
« C’est tout ? »
« Oui, j’ai envie de voir des oiseaux. »
« Alors on arrête la botanique et on va aux zoisos bonome. Tu crois que Martin va venir nous voir ? C’est pas l’heure de notre rendez-vous. »
On est allés à un observatoire pour observer les zoisos. On les connaît bien dans ce Royaume. Chaque zoiso a son secteur à cause de son nid alors quand on arrive à un point d’observation on sait qui on va voir. C’est un peu comme nos amis. Comme ils ont l’habitude de nos visites ils se sauvent plus et on peut les regarder avec plein de beauté dans les yeux et voir si ils vont bien. On reste en silence et on les écoute pour prendre de leurs nouvelles. A cet observatoire il y a des grèbes. Le petit grèbe huppé qu’on a vu dans son œuf (Podiceps cristatus, Podicipédidés). Il a bien grandi le petit. Il a encore ses rayures noires sur la tête et un anneau noir autour de chaque œil. On dirait qu’il a des lunettes. C’est rigolo 🙂
Il y a des grébous aussi (Tachybaptus ruficollis, Podicipédidés). Mais c’est normal de voir des grèbes au Royaume des Grèbes. Ce grébou est en plumage internuptial mais il garde sa commissure jaune à la base du bec toute l’année. C’est vraiment mignons les grébous. On voit pas bien sur les fotos mais c’est tout petit.
On a changé d’observatoire pour voir d’autres zoisos. D’abord, on a vu un héron cendré (Ardea cinerea, Ardéidés). Il y a souvent un héron à cet endroit. Il marche sur le bord de l’eau, ou il attend qu’une proie se présente. J’aime beaucoup les hérons moi.
« Bonome, tu vois ce héron ? »
« Chien, canne blanche, tout ça tout ça … »
« Oui, pardon. Tu vois sa tête alors. Elle est toute grise. Mais des fois, ils ont pas la tête toute grise mais blanche avec une calotte noire. C’est normal ça ? »
« Oui petitours. Les juvéniles ont la tête grise. Ce n’est qu’après la première année qu’ils acquièrent leur plumage adulte avec la tête noire et blanche. »
« On voit des hérons cendrés tout le temps et c’est que maintenant que tu me le dis. Ça va pas du tout ça bonome ! »
« Max, je peux t’avouer quelque chose. »
« Bien sûr, tu peux tout me dire. »
« J’ai découvert ce changement de plumage chez le héron cendré il n’y a que quelques jours en lisant ton livre de zoisos. »
« Tu découvres encore des choses ? »
« Chaque jour Max. Et chaque jour je découvre l’étendue de mon ignorance. »
« LE HÉRON ! REGARDE VITE ! FOTOE-LE ! »
Il s’est envolé le héron juvénile et il est allé embêter un autre juvénile. Ils se sont chamaillés en vol puis se sont posés mais ils ont recommencé à se chamailler. C’est comme ça les petits, ça se chamaille tout le temps. Bon, c’est une bonne nouvelle qu’il y ait des juvéniles. On se demandait si il y avait eu des naissances de hérons cette année. On peut supposer que oui. Il va bien ce Royaume.
« Max, si tout va bien dans ce Royaume, nous pouvons rentrer comme cela tu pourras faire ton travail pour la schola. »
« Bonome. »
« Oui petitours. »
« J’ai toujours pas envie de rentrer. »
« Regarde les grébous alors 🙂 (Grèbe castagneux, Tachybaptus ruficollis, Podicipédidés). »
Grébou, c’est le chouchou de mon bonome, et là, il nous a montré des attitudes de grébous. D’abord, il s’est énervé et il est parti à toute vitesse, comme ça, d’un coup. On sait même pas pourquoi.
Et puis après il a ploufé pour pêcher, devant nous, pour bien nous montrer. L’eau est très claire alors on a pu le voir nager un peu sous l’eau. Je sais bien que je le dis souvent mais ça nage très très vite un grèbe. Forcément, pour attraper un poisson sous l’eau il faut aller très vite, oulala. Moi j’arriverais pas à attraper un poisson sous l’eau.
« Max, tu ne sais pas nager. »
« Ben oui bonome, c’est pour ça que j’arriverais pas à attraper un poisson sous l’eau. T’es bête toi 🙂 »
« Bonome, il va falloir rentrer maintenant. On a du travail pour la schola. »
« Tu veux rentrer petitours ? »
« Non mais il le faut bien. Allez, on s’arrêtera dans les observatoires quand même. »
« Allons-y Max. »
…
« BONOME ! BONOME ! Regarde Martin est là ! »
« Chuuut Max, tu vas le faire fuir. »
« Il est venu ! Mais ce n’est pas le bon endroit pour le rendez-vous ! Et il est très en avance. C’est toi qui lui as demandé de venir ? Merci bonome. »
« 🙂 »
« Dis, tu m’as jamais dit : il y a un dimorphisme sexuel chez les Martin-pêcheurs (Alcedo atthis, alcédinidés) ? »
« Oui, très léger. Le mâle a le bec entièrement noir alors que celui de la femelle à la base orange. »
« Mais alors c’est pas Martin là devant nous : c’est Martine. Elle est belle Martine. Je l’aime beaucoup moi. Mais quand même, ce n’est ni l’heure ni l’endroit de notre rendez-vous. Tu crois qu’on le reverra là-bas ? »
« Peut être Max, mais tu sais bien qu’on ne peut jamais prévoir au Pays des zoisos. »
En attendant de savoir si on allait le revoir, il y a un grébu qui est venu nous saluer (Grèbe huppé, Podiceps cristatus, Podicipédidés). C’est un juvénile mais ce n’est pas celui qu’on a vu alors qu’il était encore dans son œuf.
Il est pas très vieux ce juvénile. On le voit à ses rayures sur la tête et le cou. Elles vont disparaître avant l’hiver. Et il a pas encore ses huppes sur la tête. Il a juste deux touffes de plumes. Faut pas lui dire, mais il a l’air un peu bête ce grébu. Les ados ça a toujours l’air un peu bête.
Puis on est allés au dernier observatoire. C’est là le rendez-vous avec Martin. Moi j’espérais qu’il vienne. Bonome disait rien mais je sais bien qu’il espérait comme moi. Lui aussi il aime beaucoup Martin. Mais tout le monde aime Martin. C’est le plus beau zoiso de tous les zoisos 🙂
On s’est installés dans l’observatoire pour attendre les zoisos qui ne manqueraient pas de venir. Et même s’ils venaient pas, on serait bien quand même à regarder le paysage. Je m’en lasse pas de ce Royaume. C’est vraiment beau la nature. Tu vois l’arbre à gauche Princesse ? C’est un saule. Bonome dit qu’il y a beaucoup d’espèces de saules et on a jamais fait la botanique des saules alors on connaît pas l’espèce mais c’est un beau saule. Et les zoisos l’aiment beaucoup. C’est sur ses branches qu’on a fotoé Martin de tout près. Et là, il y avait un petit zoiso, un passériforme ou un passereau, c’est comme tu préfères, qui se baladait dans les branches. Et il s’envolait, s’éloignait de quelques mètres au dessus de l’eau, faisait rapidement demi-tour et revenait dans l’arbre. Puis il recommençait. Il attrapait de petits insectes au-dessus de l’étang pour se nourrir. Bonome a été très patient et il a fini par réussir à le fotoer. Regarde ce petit passereau Princesse.
C’est un très petit zoiso : il fait à peine 10 à 12 cm du bout du bec au bout de la queue. C’est un pouillot. Le problème des pouillots c’est qu’il y a 4 espèces qui se ressemblent beaucoup et c’est pas facile de les distinguer. On a bien étudié mon beau livre de zoisos. On s’est gratté la tête en réfléchissant … On a cherché dans d’autres livres … On s’est re-gratté la tête … A vrai dire on sait pas vraiment qui c’est ce pouillot. Il a les pattes sombres alors c’est peut être le pouillot véloce (Phylloscopus collybita, Phylloscopidés). Mais c’est pas sûr. Oulala. C’est pas sûr du tout. Pour le distinguer du pouillot fitis, on peut écouter les chants. Mais les fotos, ça chante pas alors on peut pas savoir. N’empêche qu’il est très beau ce petit zoiso.
Puis on a observé un grébu juvénile. On connaît bien les grébus mais là, il faisait sécher ses ailes.
Bonome dit que c’est après la toilette qu’il fait sécher ses ailes comme ça. Parce que l’hiver dernier, il a vu un grébu qui se toilettait et il a tout fotoé. Il était déjà fou dans sa tête à l’époque. Il a fait 450 fotos. Il a toute la scène. Toute la toilette. Et à la fin de la toilette, le grébu faisait sécher ses ailes comme ça. Ce petit grébu est tout propre.
Le pouillot est revenu. C’était la première fois qu’on le voyait ce pouillot, on le connaissait pas bien. Mais je crois qu’il avait compris qu’on aimait regarder les zoisos et les fotoer. Alors il s’est posé juste en face de nous, sur une branche sans feuilles avec juste le gris de la surface de l’eau derrière lui. Il nous a regardés et, comme pour nous faire plaisir, il a bien pris la pose. Bonome lui a souri et l’a fotoé en le remerciant d’être venu pour son petitours. Puis ils se sont parlés en zoiso. Moi, j’ai rien compris à ce qu’ils se disaient mais bonome a encore plus souri et a dit d’accord puis merci petit pouillot.
Puis bonome m’a pris dans ses bras, m’a gratté le front en me demandant d’attendre encore un peu. On est restés quelques minutes comme ça. Moi je ronronnais et lui scrutait le paysage. Puis il m’a posé face à une autre fente d’observation pour m’éviter de tout escalader.
« Il est venu … Martin est venu à notre rendez-vous … Comment tu fais bonome ? »
« Chuuut … »
« Il vient toujours à notre rendez-vous. Tu crois qu’il nous aime bien ? Il nous a domestiqués ! »
On a vraiment fait une grande promenade aujourd’hui. Je suis épuisé. Mais on a vu pleins de beaux zoisos grâce à bonome. Il est fort pour les trouver. Tu sais Princesse, quand Martin est reparti après notre rendez-vous, on est restés un long moment en silence, sans bouger, encore sous le charme de la rencontre. Et si j’avais pu, je lui aurais tenu la main à mon bonome. Mais j’ai pas de doigts moi 🙁
Tout va bien aux trois Royaumes Princesse. Moi, je suis le plus heureux des petitours. J’ai beaucoup de chance de connaître ce grand chevalier qui parle aux zoisos et qui sourit au vent. Je t’embrasse Princesse. J’espère que toi aussi tu vas bien.