Samedi 1er Août, An II
Bonjour Princesse,
Aujourd’hui bonome m’a annoncé qu’il voulait m’emmener visiter une charmante petite ville. Je suis très intrigué parce que bonome il va jamais là où il y a des zoms et dans une ville il y a plein des zoms. Peut être que son cerveau a complètement fondu 🙁 Et puis dans une ville il y a pas beaucoup de zoisos… Alors j’ai négocié : je veux bien aller à la Charmante Petite Ville si on passe voir les zoisos du Royaume des Chevaliers. Bonome a étudié la carte et il a dit que c’était possible.
« Allez, en route bonome. Les zoisos nous attendent. »
« Ça commence mal pour toi petitours. Le premier oiseau est un rapace. »
« Oui, je le reconnais. C’est le jeune faucon crécerelle qui nous a salués la dernière fois (Falco tinnunculus, Falconidés). »
« Tu ne t’es pas caché dans ma poche ? »
« Bonome, il faut que je t’avoue quelque chose. J’ai plus peur des rapaces depuis longtemps. »
« Mais alors, pourquoi te caches-tu dans ma poche chaque fois que nous en croisons un ? »
« 🙂 »
« Max … »
« Oui, je sais … Pas besoin d’attendre un rapace. Mais j’aime bien faire des rapaces des générateurs aléatoires de câlins. Allez : aux zoisos … Oh, regarde le héron cendré (Ardea cinerea, Ardéidés) ! Fotoe le s’il te plaît. J’aime voir les héron voler. »
« Voila petitours. Mais je ne sais pas si elles seront belles mes photos. »
« Elles sont toujours belles tes fotos. On y voit plein d’amour 🙂 … Dis, tu crois qu’on se lasse un jour de toutes ces belles choses ? Tu crois qu’un jour je ne regarderai plus les hérons s’envoler ? »
« Je ne sais pas Max. Je parcours le Pays des Zoisos depuis des années. J’ai vu des centaines de hérons cendrés mais ils m’émerveillent toujours. C’est comme ce papillon, le flambé (Iphiclides podalirius, Papilionidés). »
« Oui, c’est notre guide de la dernière fois. Qu’est ce qu’il est beau ! »
« Je l’ai déjà ‘fotoé’. Mais je le ‘fotoe’ encore. Et je recommencerai encore et encore … »
« Oui bonome. Regarde cette jolie fleur. Tu veux bien faire la botanique avec Gaston. J’aime bien faire la botanique. C’est comme une enquête. Tu tournes les pages et moi je fais les choix. Au boulot bonome. Page 25 pour voir à quelle page se trouvent les plantes à pétales soudés. »
« Page 30. Mais il va y avoir beaucoup de choix à faire 🙂 »
« On essaye. Les étamines sont soudées à la corolle … Il y a 5 ou 6 étamines, je ne vois pas bien … Plutôt 5 … Les feuilles sont vertes … Les sépales sont réunis entre eux à la base … Les feuilles sont alternes … et non épineuse … Bonome, je vois pas l’ovaire. Comment je fais ? »
« Tu triches 🙂 Regarde les dessins de la page 31 … Tu reconnais ta fleur ? »
« Oui. Donc l’ovaire n’est pas divisé extérieurement. C’est une plante grimpante, à étamines libres entre elles et à corolle en entonnoir. C’est la famille des Convolvulacées. Voir page 76 … Je sais pas ce que c’est une bractée. »
« C’est une feuille située au voisinage immédiat de la fleur. »
« Je les vois pas. »
« Elles sont loin de la fleur. »
« Mais … Tu as dit qu’elles étaient au voisinage de la fleur … »
« Ce sont les feuilles les plus proches de la fleur. Elles sont sur le pédoncule floral. »
« Oulala, c’est compliqué. Mais on a trouvé quand même. C’est le liseron des champs. C’est quoi son nom en scientifique ? »
« Convolvulus arvensis. »
« Merci bonome. »
Après, on a observé les zoisos du Royaume des Chevaliers mais on les connaît déjà. Bonome a voulu fotoer des zoisos en vol. Il aime bien mais il ronchonne toujours parce que son appareil va pas assez vite ou que le zoiso bouge trop ou encore parce qu’il réagit trop tard. J’aime bien le voir ronchonner. Il m’amuse. Là, il a réussi à fotoer un vanneau huppé (Vanellus vanellus, Charadriidés) et un tadorne de belon (Tadorna tadorna, Anatidés) mais c’est pas pour eux que je mets les fotos. C’est que, en regardant bien, on a vu que le zoiso avec les pieds dans l’eau, on l’avait jamais fotoé comme ça. C’est la barge à queue noire (Limosa limosa, Scolopacidés). Elle est un peu floue. Si on avait su, on l’aurait bien fotoée. Mais je crois que bonome l’avait prise pour un chevalier gambette. Tant pis.
On est arrivés tout au bout du Royaume des Chevalier, au petit fleuve. Cette fois, il n’y avait pas beaucoup d’eau. C’était tout vaseux.
Pour arriver à la charmante petite ville, il fallait encore marcher après la fin du Royaume des Chevalier. Il y avait pas beaucoup de zoisos. Des mouettes qui se sauvaient ou des aigrettes garzettes qui se sauvaient aussi. Bonome a dû oublier de les prévenir qu’on allait passer les voir.
Il n’y a que les hérons garde-bœufs qui ne se sauvaient pas. Ils restaient bien à côté des bœufs pour bien les garder. Mais je crois qu’ils voulaient qu’on les voit faire leur travail parce que la dernière fois, il gardaient rien du tout !
Puis on est arrivés à la petite ville charmante. Elle est tout entourée de remparts avec des échauguettes. Les échauguettes c’est des petites tours sur les remparts pour pouvoir surveiller. Quand une ville est entourée de remparts on dit qu’elle est fortifiée. On a pas visité tout de suite. Bonome, il a voulu se caféiner. Il se caféine tout le temps. Il pétune et il se caféine. Tu devrais le gronder Princesse. Il s’abîme la santé.
Pendant qu’il se caféinait, une coccinelle s’est posée sur sa main. Alors j’ai observé la coccinelle.
« Bonome, elle est bizarre cette coccinelle. Elle a pas des points mais des carrés. Et elle est jaune et noire. Tu la connais ? C’est une amie à toi ? Elle vient discuter un peu ? »
« 🙂 C’est la coccinelle à 14 points (Propylea quattordecimpunctata, Coccinellidés). »
Elle est restée une dizaine de minutes sur son doigt. Bonome l’a laissée faire. Il gardait le doigt tendu pour pas l’embêter. Il l’a juste grondée quand elle l’a mordu avec ses mandibules. Il lui a dit qu’il ne fallait le goûter, qu’il était trop gros pour qu’elle le mange. Puis il a attendu qu’elle s’en aille. Il est comme ça bonome. A chaque pause, il y a des insectes qui se posent sur lui et il les laisse faire. Même les guêpes. Il dit que si il reste calme, elles ne le piqueront pas.
Puis il a fotoé le ciel. Ou plutôt des spatules blanches. C’est les zoms de la table d’à côté qui ont dit ‘Qu’est ce qu’il a à faire des fotos du ciel ?’ Il le regardait bizarrement alors ils ont pas vu les spatules. Et une guêpe les a piqués. Je crois qu’elle a pas aimé qu’ils se moquent du grand chevalier au petitours bleu.
Après son caféinage, on a fait les touristes sur les remparts. C’est rigolo de faire le touriste.
« Tu vois petitours, c’est d’ici que Samuel de Champlain est parti en 1608 pour aller fonder Québec en Nouvelle-France. »
« Il est parti comment Samuel de Champlain ? »
« En bateau Max, évidemment. »
« D’ici ? »
« Oui Max. D’ici ! De ce port. »
« Bonome. »
« Oui Max, je sais ce que tu vas dire : ‘Mets ta casquette bonome, tu as le cerveau qui fond. Un port c’est à la mer et éléoulamer ? Tu vas pas bien dans ta tête !’ J’ai bon ? »
« Oui 🙂 Tu me connais bien 🙂 Mais j’aurais ajouté une ou deux petites choses du genre : Et comment il a fait avec son bateau ? Il l’a posé sur une planche à roulettes et il a poussé jusqu’à la mer ? C’est pour ça qu’il est connu Samuel de Champlain ? Pour avoir inventé la planche à roulettes pour pousser les bateaux à partir des ports où il y a pas la mer ! »
« 🙂 C’est tout ? »
« Ben, c’est que j’improvise. Si tu m’avais laissé un peu de temps j’aurais pu mieux faire 🙂 Montre moi la carte bonome que tu vois où elle est la mer …
… Tu vois, on est là. La mer est là-bas. Sur la carte il y a environ 12 cm. C’est une carte au 25 000ème ce qui veut dire qu’un centimètre représente 250 m donc la mer est à 3 km. Alors comment il a fait, Samuel de Champlain ? Tu m’expliques depuis quand un port se trouve à 3 km de la mer ? Il faut vraiment que tu mettes ta casquette. Ça va pas du tout ça ! »
« As-tu terminé de ronchonner ? Oui ? Je peux expliquer ? Si tu regardais la carte attentivement, tu verrais que la plupart des terrains qui entourent la ville ont une altitude de 1 ou 2 m. Et tu sais que la mer peut aller ou venir sur la terre. »
« Oui, mais c’est pour les étages, ça. Maintenant elle bouge plus la mer. »
« Pourquoi ne bougerait-elle plus ? En fait, c’est la terre qui avance ici. Le courant à marée montante a plus d’énergie qu’à marée descendante. Les sédiments qui arrivent avec la marée ne peuvent plus repartir. Depuis des siècles le fond de l’eau remonte dans la région. Ici, il est tellement remonté que la terre émerge. Jusqu’au 15ème ou 16ème siècle, les bateaux pouvaient venir jusqu’ici. Ils n’allaient pas plus loin à cause d’un cordon naturel qui correspond à peu près à la butte de Hiers. Ils s’arrêtaient et se délestaient des galets qu’ils contenaient. »
« Ça veux dire quoi délester ? »
« Les bateaux venaient ici chercher du sel. Mais en venant, ils ne transportaient pas de marchandises. Alors, pour ne pas qu’ils soient trop légers, on remplissait leurs cales de galets. C’est ici que les marins vidaient les galets, qu’ils délestaient les bateaux. La ville est construite sur une île artificielle de 55 hectares constituée de galets. On peut en trouver quelques uns aux pieds des remparts. C’est en 1555 que cette île a été complétée par des rochers datant du jurassique et que la ville a été construite. C’est le cardinal de Richelieu (1585-1642) qui a demandé qu’elle soit fortifiée. C’était bien un port autrefois même si maintenant la ville n’est reliée à la mer que par un étroit chenal. On l’appelle le ‘Havre de la Charmante Petite Ville’. Havre est un mot d’origine hollandaise qui veut dire port. Il a aussi donné harbour en anglais. »
« Bonome. »
« Oui Max. »
« Encore une fois, je te dois des excuses. »
« Non Max. Je me doutais de ta réaction. Je l’attendais même avec impatience. Je me demandais ce que tu allais trouver à dire. Tu ne m’as pas déçu. J’ai bien aimé ‘la planche à roulettes pour pousser les bateaux à partir des ports où il y a pas la mer‘. »
« C’est pour ça que tu voulais venir dans cette charmante petite ville ? »
« Oui. Tu m’en veux ? »
« Bien sûr que non, mon bonome. Je m’amuse bien avec toi 🙂 »
Samuel de Champlain | Armand Jean Du Plessis, Duc de Richelieu |
Après, on a rejoué aux touristes. Bonome connaît bien la charmante petite ville. Surtout les détails que les autres zoms voient pas forcément. Il m’a montré les graffitis anciens. Parce que c’était une ville de garnison. Ça veut dire qu’il y avait des soldats. Et les soldats devaient monter la garde dans les échauguettes et aux grandes portes de la ville. Des fois, ils s’ennuyaient alors ils faisaient des graffitis sur les murs.
Ce sont des bateaux à sel. En Charentmaritimie on produisait beaucoup de sel. Il y a des bassins peu profonds où on fait entrer l’eau de mer. Mais pas beaucoup. Puis, avec le soleil et le vent, l’eau s’évapore et il reste que le sel. Ce sont les sauniers qui ramassent le sel.
Et puis on a vu ça.
C’est un nid d’hirondelle. On dirait des petites hirondelles des fenêtres (Dolichon urbicum, Hirundinidés). Elles sont toutes mignonnes. On voit bien comment est fait le nid. Les parents prennent un peu de boue et viennent la déposer. Puis il recommencent et ça fait un nid.
Bonome est retourné se caféiner. Il profite qu’il est en ville. D’habitude il peut pas se caféiner. Je l’ai laissé faire parce qu’il allait falloir beaucoup marcher pour retourner à notre monture. C’est un peu ma faute. C’est moi qui ai demandé à passer par le Royaume des Chevaliers.
« Allez bonome, on y va. Tu crois qu’on va avoir de belles surprises au Royaume des Chevaliers ? »
On a vu un moineau domestique (Passer domesticus, Passéridés). Faut pas négliger les moineaux. Ils sont mignons les moineaux. Celui-ci est un juvénile pas très vieux. Il a pris la pause. Peut être qu’il voulait être dans mon blog ?
Ensuitz on a croisé l’échasse blanche (Himantopus himantopus, Récurvirostridés). J’adore ce zoiso. Il est à la fois rigolo avec ses longues pattes trop grandes et très élégant. Et il a l’air tout fragile. On a pas fait de bruit pour pas la déranger. J’aime bien la voir voler mais j’aime pas embêter les zanimos. Elle cherchait du manger alors on l’a laissée manger tranquillement. On en reverra d’autres. Et si on est gentils, elles s’envoleront pour nous.
Plus loin, il y avait une spatule blanche (Platelea leucorodia, Threskiornithidés). Sur la foto, on voit bien son gros bec. On voit aussi qu’elle a une petite poche sous le bec.
« Bonome, bonome ! C’est un pelote de régurgitation ! On peut la prendre pour la disséquer plus tard. Comme ça on saura ce qu’il a mangé le zoiso. Tu veux bien bonome ? S’il te plaît. »
« Oui petitours. Nous la disséquerons plus tard. Tiens, il y en a une autre. Il a dû beaucoup manger le zoiso. »
« Bonome. »
« Oui max. »
« Tu dis zoiso, fotoer … Et moi j’ai un sacado comme toi. On se ressemble un peu maintenant 🙂 »
« 🙂 … Regarde la pouldo et son petit, Maxou. »
« Mais … T’es pas gentil 🙁 Tu te moques de moi. J’ai dit pouldo une seule fois. C’était le premier jour. Je sortais du château et je connaissais pas le Pays des Zoisos 🙁 »
« Je ne voulais pas me moquer Max. Je suis désolé de t’avoir fait de la peine. Câlin ? »
« NAN … Si 🙂 »
Le chardonneret rigolo est venu nous voir (Carduelis carduelis, Fringillidés). On en voit chaque jour. C’est peut être le seul zoiso qu’on voit chaque jour. Je me demande s’il n’est pas chargé de veiller sur nous au Pays des Zoisos. Un peu comme un ange gardien mais en zoiso. Un zoiso gardien qui donnerait l’alerte s’il nous arrivait quelque chose. Ou alors il vient faire un rapport à mon chevalier pour sa mission de savoir si tout va bien au Pays des Zoisos. Puis bonome a fotoé des plantes. Du moins, c’est ce que je croyais au début. Mais il fotoe pas les plantes de loin comme ça. Alors j’ai bien observé et j’ai vu le zoiso.
C’est un Pipit rousseline (Anthus campestris, Motacillidés). La plante est jolie. C’est une Astéracée. Bonome dit que c’est la centaurée chausse-trappe ou centaurée étoilée (Centaurea calcitrapa, Astéracées). Elle est toute sèche. Elle doit dater de l’année dernière parce que normalement elle fleurit en juillet ou en août. Même si il fait chaud et sec, ça me paraît un peu rapide pour qu’elle soit déjà toute sèche comme ça.
« Bonome, regarde le hérons garde-bœufs. Il est beau. C’est son plumage nuptial ? »
« Oui petitours. »
« Il garde rien du tout. Le dis pas à Princesse, il se ferait gronder. Il doit être en train de se reposer. Et il retournera garder les bœufs plus tard. »
Ensuite, on est arrivés à notre monture. J’étais bien content d’y arriver parce que bonome a mal à la cheville et au genou. Il dit rien et fait en sorte que je m’en rende pas compte. Mais je sens bien qu’il boite. Il marche trop. Tout ça pour que je vois des zoisos et des belles choses. Ça m’embête.
En chemin, il y avait un zoiso sur la route. Il mangeait un insecte. Bonome a arrêté notre monture avant que le zoiso s’envole. Il voulait pas le déranger pendant son repas. Il s’est donc arrêté et il a attendu.
Je t’assure Princesse. Il l’a vu de très loin et s’est arrêté pour pas le déranger. C’est vraiment un grand chevalier ce bonome. Il y a que les grands chevaliers qui laissent la place à un petit moineau. Parce que c’est encore un moineau domestique juvénile (Passer domesticus, Passéridés). Il a attrapé un insecte et le mange. On dirait une mante religieuse (Mantis religiosa) mais c’est pas facile à dire parce qu’elle est pas en bon état. Le moineau peut pas l’avaler en une seule fois alors il arrache un petit morceau en la secouant très fort. Il avale le morceau et il recommence.
Avant de rentrer, on est allé voir la mer. On s’est assis, en silence. Il y avait beaucoup d’eau dans le mer. Et des vagues. C’est reposant de regarder la mer. Bonome se met toujours un peu à l’écart pour pas m’embêter mais je sais qu’il me regarde et qu’il veille sur moi.
Princesse, comment as-tu pu croire qu’il était méchant ? Juste aujourd’hui il a accueilli une coccinelle sur son doigt puis il a laissé un moineau manger tranquillement. Et tu vois bien comment il est avec moi.
Tu sais Princesse, il remplit bien sa mission. Il inspecte bien tous les royaumes du Pays des zoisos.
Je t’embrasse Princesse. J’aimerais te revoir un jour.